Les relations commerciales entre le Canada et le Royaume-Uni dans l’éventualité du Brexit

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La sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne (UE) aura des répercussions profondes sur les relations commerciales entre le Canada et le Royaume-Uni. Selon certains calculs, par le truchement de l’UE, le Canada et le Royaume-Uni sont reliés par au moins 94 traités et accords internationaux. Le Royaume-Uni et le Canada ont conclu des traités portant sur sept grands domaines : commerce, coopération en matière de réglementation, pêches, transport, douanes, énergie nucléaire et agriculture.

Le Canada et le Royaume-Uni ont une longue tradition de relations mutuellement profitables en matière de commerce et d’investissement. Le Canada exporte et investit davantage au Royaume-Uni que dans tout autre pays de l’UE. Parallèlement, le Royaume-Uni exporte et investit davantage au Canada que les autres pays membres de l’UE. Les deux pays souhaitent conserver et resserrer ces relations dans leur intérêt réciproque. Le gouvernement du Canada s’est engagé à ménager une « transition en douceur », peu importe ce qu’il adviendra du Brexit.

Le projet de synthèse des connaissances a permis de cerner les conséquences d’un après-Brexit sur les relations commerciales qu’entretiennent actuellement le Royaume-Uni et le Canada. Les auteurs du rapport ont analysé les engagements du Royaume-Uni en vertu des accords internationaux pertinents conclus par le Royaume-Uni et l’UE avec le Canada, et ils se sont penchés sur les mesures qui seront nécessaires, tant à l’échelle internationale que nationale, pour préserver le statu quo et assurer une transition en douceur. Ils ont examiné trois scénarios distincts :

  • la conclusion d’un accord de retrait;
  • ce qui se passerait à l’expiration d’un tel accord de retrait;
  • un Brexit « sans accord », où le Royaume-Uni quitterait l’UE le 29 mars 2019 sans la conclusion d’un accord.

Trois angles d’analyse sont proposés :

  • le cadre juridique multilatéral relevant de l’Organisation mondiale du commerce (OMC);
  • le cadre juridique bilatéral existant en vertu de l’Accord économique et commercial global (AECG) entre le Canada et l’Union européenne, qui est maintenant provisoirement en vigueur pour toutes les parties visées;
  • la mesure dans laquelle la législation nationale actuelle ou à venir au Canada et au Royaume-Uni entrave ou favorise l’établissement de nouvelles relations commerciales entre les deux pays.
  • Le fait de cesser d’être un État membre de l’UE a des répercussions majeures sur la situation juridique du Royaume-Uni en vertu d’un éventail d’accords internationaux, dont ceux conclus avec le Canada. Bon nombre de ces accords ont été conclus par l’UE seule (et, par conséquent, s’appliquent au Royaume-Uni du fait de son appartenance à l’UE) ou par l’UE de concert avec le Royaume-Uni, auquel cas il est important de déterminer la position du Royaume-Uni. Il s’agit notamment de traités à l’égard desquels l’UE a exercé sa compétence avant ou après 1973, année où le Royaume-Uni s’est joint à l’UE. Dans certains cas, après son départ de l’UE, le Royaume-Uni devra adhérer à ces accords ou même renégocier sa participation à ceux-ci, tandis que d’autres traités ne seront pas touchés par le Brexit.
  • Les aspects clés pour la restructuration des relations commerciales entre le Canada et le Royaume-Uni consistent à déterminer le statut juridique du Royaume-Uni et l’échéancier. L’objectif ultime du Royaume-Uni par rapport aux relations qu’il entretient actuellement avec l’UE n’a pas encore été fixé. En novembre 2018, le Parlement du Royaume-Uni a rejeté l’accord de retrait et l’énoncé de principe devant régir les relations futures. Les négociations se poursuivent, ce qui rend d’autant plus improbable l’entrée en vigueur des accords internationaux et des lois nationales nécessaires dans les deux pays d’ici le 29 mars 2019.
  • Les auteurs du rapport présument que le Brexit aura lieu. La manière dont le Royaume-Uni quittera l’UE sera déterminante. Une mise en œuvre graduelle ou un prolongement de l’accord de retrait, conformément à l’article 50 du Traité sur l’Union européenne, faciliterait grandement le processus de restructuration des relations commerciales entre le Canada et le Royaume-Uni. Un Brexit sans accord soulèverait plus de problèmes qu’il n’en résoudrait pour le Canada.
  • D’ici sa sortie de l’UE, le Royaume-Uni peut seulement chercher à maintenir des ententes équivalentes à celles déjà en place. Des versions provisoires de listes de concessions concernant les droits de douane et les contingents tarifaires ainsi que des engagements en matière de services ont circulé à l’OMC.
  • Pour le Canada, le processus visant à définir de nouvelles relations commerciales Canada – Royaume-Uni sera tributaire de l’adoption de mesures législatives nationales appropriées pour mettre en application tout arrangement pouvant être conclu par l’UE et le Royaume-Uni. En l’absence d’un arrangement, le Canada devra s’adapter et agir en conséquence. Le Royaume-Uni et le Canada ont étudié les mesures qui devront être en place au moment du Brexit pour ménager une transition en douceur. Les mesures les plus urgentes comprennent un accord sur le transport aérien et un autre sur la coopération nucléaire entre les deux pays, et il est entendu que des projets d’accord sont prêts à entrer en vigueur au besoin.
  • La question du maintien de l’ensemble des droits prévus dans l’Accord économique et commercial global pour les Canadiens au Royaume-Uni et pour les opérateurs du Royaume-Uni au Canada est plus complexe. Des discussions approfondies ont eu lieu; l’adoption d’accords internationaux et de législations nationales appropriés devient pratiquement impossible à mesure que le temps passe et que les possibilités d’agir s’amenuisent.
  • Les auteurs du rapport expriment des doutes à l’égard de la stratégie envisagée par le Royaume-Uni pour remplacer ses liens avec l’UE, à savoir un nouveau réseau d’accords commerciaux bilatéraux. Ils laissent entendre que le Royaume-Uni aurait intérêt à adopter une stratégie visant un méga-accord de libre-échange (par exemple une zone de libre-échange atlantique) avec l’ensemble de l’Europe et l’ensemble de l’Amérique du Nord.

Rapport intégral (en anglais)

On peut trouver, dans le site Web de la Chaire Jean Monnet en droit de l’intégration économique internationale, des liens vers des études de fond et vers une conférence publique prononcée à l’University College London le 6 décembre 2018.

Coordonnées des chercheurs

Armand de Mestral, professeur émérite, Université McGill, et senior fellow, Centre pour l’innovation dans la gouvernance internationale armand.de.mestral@mcgill.ca

Lorand Bartels, maître de conférences en droit international, Faculté de droit, University of Cambridge lab53@cam.ac.uk


Ce projet de recherche a été financé par le Conseil de recherches en sciences humaines (CRSH) et l’Economic and Social Research Council (ESRC), qui fait partie de UK Research and Innovation, dans le cadre du concours visant l’attribution de subventions de synthèse des connaissances pour examiner l’avenir des relations commerciales entre le Canada et le Royaume-Uni. Les opinions exprimées dans cette fiche sont celles des auteurs; elles ne correspondent pas nécessairement à celles du CRSH et de l’ESRC.


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