Comité consultatif de lutte contre le racisme à l’endroit des personnes noires dans les programmes de recherche et de formation en recherche
Rapport final et recommandations

Février 2023

© Sa Majesté le Roi du chef du Canada, représenté par le ministre de l’Innovation, des Sciences et de l’Industrie du Canada, 2023
No de cat. CR22-124/2023F-PDF
ISBN 978-0-660-47145-7

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Comité consultatif de lutte contre le racisme à l’endroit des personnes noires dans les programmes de recherche et de formation en recherche

Rapport final et recommandations

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À propos de ce rapport

Ce rapport est le fruit du travail du Comité consultatif de lutte contre le racisme à l’endroit des personnes noires dans les programmes de recherche et de formation en recherche. Créé en avril 2021, ce Comité avait pour mandat de recommander au Conseil de recherches en sciences humaines (CRSH) des façons de circonscrire les entraves existantes, d’assurer un accès équitable au financement aux chercheures et chercheurs noirs et de leur permettre de faire entendre leur voix et d’accroître leur visibilité au sein de ses programmes de recherche et de formation en recherche, y compris les programmes interorganismes qu’il gère.

« Le travail du Comité s’inscrit dans une longue tradition de mobilisation entreprise par nous, les personnes noires, pour revendiquer la place qui nous revient dans la société canadienne. »

Wendell Nii Laryea Adjetey (Ph. D.), coprésident

« Le Comité vise à combler les lacunes et réfuter les négations en éducation pour créer collectivement un discours holistique articulé autour de l’identité noire. »

Karine Sanchez-Coen (doctorante), coprésidente

« Ma participation à ce Comité avec le CRSH et d’estimés collègues africains, caribéens et noirs de partout au pays a été une expérience cathartique. Ce lieu d’échanges, d’analyse et de recherche des solutions autour du problème pernicieux du racisme à l’endroit des personnes noires dans l’écosystème de la recherche au Canada est la promesse d’un avenir meilleur, que nous pouvons collectivement désigner comme le levier nécessaire du changement transformationnel. »

Sulaimon Giwa (Ph. D.), membre du Comité

Déclaration de la coprésidence du Comité consultatif

Le rôle de coprésidence de ce Comité s’est avéré aussi ardu qu’enrichissant. La profondeur des recherches scientifiques, les perspectives régionales et le dévouement des membres, sans oublier le professionnalisme et l’attention des partenaires du CRSH, ont fait de ce processus une expérience formatrice et constructive. Bien que tout changement structurel prenne du temps, nous devons poursuivre sans relâche notre quête d’équité pour les chercheures et chercheurs noirs. D’autre part, le CRSH se doit de jouer franc jeu et de responsabiliser les universités à la protection des intérêts du personnel enseignant, du corps étudiant aux cycles supérieurs et du personnel noirs. En garantissant l’équité de nos milieux de travail et de recherche, nous freinerons l’exode des cerveaux vers les établissements américains qui limite la contribution des chercheures et chercheurs noirs de talent à la société canadienne.

En participant à ce Comité, nous avions pour objectif de mettre en œuvre des changements à long terme qui reflètent les intérêts des communautés noires. Nous avons ainsi formulé des recommandations visant à accroître la visibilité des scientifiques noirs en milieu universitaire. Ce processus continu demande des objectifs fermes à long terme qui favorisent l’intégration des principes d’équité, de diversité et d’inclusion (EDI) dans le plan et les pratiques de recherche et la hausse de la participation équitable et inclusive dans le système de recherche, notamment dans les équipes de recherche et la collecte de données. Au fond, dans toute analyse portant sur les obstacles ou les besoins des communautés noires, il est essentiel de faire appel à des chercheures et chercheurs noirs (ou à des personnes ayant une expérience vécue du racisme à l’endroit des personnes noires) pour la prise de décision et la gouvernance.

Notre démarche

Contexte

Selon l’Organisation des Nations Unies, environ 200 millions de personnes se considérant d’ascendance africaine vivent en Amérique, et des millions d’autres vivent dans diverses régions du monde, en dehors du continent africain. Malgré les efforts déployés au cours des dernières décennies, les personnes d’ascendance africaine subissent encore de la discrimination dans de nombreux pays et figurent parmi les groupes les plus marginalisés de la population Note de bas de page 1.

Afin de s’attaquer au racisme et à la discrimination raciale, l’Organisation des Nations Unies a créé en 2008 le Groupe de travail d’experts sur les personnes d’ascendance africaine Note de bas de page 2 pour étudier les problèmes de discrimination raciale vécus par les personnes d’ascendance africaine dans la diaspora et élaborer des propositions en vue d’éliminer la discrimination raciale contre les Africaines et Africains et les personnes d’ascendance africaine partout dans le monde.

À la suite des recommandations du groupe de travail, l’Assemblée générale des Nations Unies a proclamé en 2015 la Décennie internationale des personnes d’ascendance africaine, qui s’étend de 2015 à 2024 Note de bas de page 3. Grâce à cette résolution, les États membres et l’Organisation des Nations Unies disposent d’un cadre solide pour permettre à la société civile et aux personnes concernées de joindre leurs forces à celles des personnes d’ascendance africaine pour lutter contre le racisme à l’endroit des personnes noires.

En 2018, le gouvernement du Canada a annoncé qu’il reconnaissait officiellement la Décennie internationale des personnes d’ascendance africaine et s’est engagé à assurer un avenir meilleur aux Canadiennes et aux Canadiens noirs et à creuser la question, notamment en améliorant la recherche et la collecte de données afin de mieux comprendre les défis à relever Note de bas de page 4.

Au Canada, c’est depuis le 17e siècle que des personnes d’ascendance africaine et caribéenne ont élu domicile au Canada. En effet, il y a plusieurs siècles que les communautés noires se sont établies en Nouvelle-Écosse et ailleurs au Canada, et des groupes de personnes immigrées plus récemment continuent de façonner l’histoire du pays. Depuis, de nombreuses générations aux origines diverses ont résisté à l’esclavage, à la ségrégation résidentielle et scolaire ainsi qu’au racisme sous toutes ses formes à l’endroit des personnes noires Note de bas de page 5.

Création du Comité consultatif

Au fil des ans, le CRSH a élaboré différentes politiques visant à s’attaquer aux obstacles systémiques qui limitent l’accès des groupes marginalisés au financement, en plus d’adopter différentes pratiques et politiques visant à promouvoir l’EDI au sein de l’organisme, dans les établissements d’enseignement postsecondaire et autres milieux de recherche et dans les pratiques et les méthodes de recherche. Les organismes fédéraux de financement de la recherche ont récemment publié un plan d’action en matière d’EDI. Cependant, pour les communautés noires, aucune mesure spécifique ne tient compte de l’intersection des ethnies et des cultures, élément nécessaire à la caractérisation du racisme à l’endroit des personnes noires. Les événements de 2020, notamment le meurtre de George Floyd et les effets disproportionnés de la COVID-19 sur les personnes racisées, ont braqué les projecteurs dans le monde entier sur l’existence bien réelle du racisme systémique à l’endroit des personnes noires. Afin d’assurer la pleine participation du corps étudiant et des chercheures et chercheurs noirs à l’écosystème de recherche canadien, il faut poursuivre les démarches pour cibler et atténuer les obstacles auxquels ces personnes sont confrontées.

Le Comité consultatif avait pour mandat d’étudier des questions programmatiques liées à la discrimination à l’encontre des personnes d’origine africaine et caribéenne dans la recherche et l’écosystème de la formation en recherche en sciences humaines au Canada, en mettant particulièrement l’accent sur le financement, dans l’objectif de formuler des recommandations pour encadrer la mise en œuvre d’un plan d’action à long terme. Ainsi, le Comité a étudié les moyens à la disposition du CRSH qui lui permettront de jouer un rôle déterminant dans la décolonisation du milieu universitaire et de son propre organisme, et de fournir les ressources nécessaires au corps étudiant et à la communauté de recherche noire des universités de partout au pays. Concrètement, le Comité consultatif a examiné les contextes dans lesquels les voix, les expériences et les perspectives des personnes noires sont représentées dans les milieux scientifiques, de même que les questions d’équité et d’inclusion des chercheures et chercheurs, étudiantes et étudiants des cycles supérieurs et titulaires de bourses postdoctorales noirs.

Composition du Comité

La composition du Comité se voulait à l’image de la diversité historique, géographique, culturelle et linguistique des communautés de recherche noires. Parmi ses 11 membres, on comptait :

  • une étudiante de cycle supérieur;
  • une représentation équilibrée de personnes se trouvant à différentes étapes de leur carrière, représentant une diversité de genres, appartenant aux communautés francophones et anglophones, provenant de différentes régions, travaillant dans les domaines des sciences sociales et des sciences humaines ainsi que provenant de petits et de grands établissements;
  • une combinaison de représentantes et représentants de communautés noires établies de longue date au Canada et de personnes immigrantes venues de différentes régions (surtout des Caraïbes et d’Afrique);
  • une expertise internationale.

Les membres du Comité ont nommé deux personnes à la coprésidence : Wendell Nii Laryea Adjetey et Karine Coen-Sanchez.

  • Wendell Nii Laryea Adjetey (coprésident), professeur adjoint et titulaire de la Chaire William Dawson, Département d’histoire et d’études classiques, Université McGill
  • Karine Coen-Sanchez (coprésidente), doctorante, École d’études sociologiques et anthropologiques, Faculté des sciences sociales, Université d’Ottawa
  • Adeniyi P. Asiyanbi, professeur adjoint, Géographie humaine, campus Okanagan de l’University of British Columbia
  • Michael F. Charles, vice-recteur adjoint, Équité, diversité et inclusion, Centennial College
  • Denise Ferreira da Silva, professeure et directrice, Social Justice Institute; Senior Faculty Fellow, St. John’s College, University of British Columbia; professeure auxiliaire, Département des beaux-arts, Monash University
  • Mamoudou Gazibo, professeur, Département de science politique, Université de Montréal
  • Sulaimon Giwa, professeur adjoint et doyen associé, Programmes de premier cycle, École de travail social et Département de sociologie, Études policières, Memorial University of Newfoundland; titulaire d’une chaire dotée en criminologie et justice pénale, Département de criminologie et de justice pénale, St. Thomas University
  • Barbara-Ann Hamilton-Hinch, professeure agrégée, Activités récréatives et sciences du loisir, School of Health and Human Performance; vice-rectrice adjointe, Équité et inclusion, Dalhousie University
  • Rhonda McEwen, titulaire de la Chaire de recherche du Canada en interfaces tactiles, communication et cognition; vice-rectrice à l’enseignement et doyenne, University of Toronto Mississauga; professeure en médias émergents, Institute of Communication, Culture, Information and Technology, University of Toronto Mississauga
  • Barbara McNeil, professeure agrégée, Enseignement des langues et de l’alphabétisation, Faculté des sciences de l’éducation, University of Regina
  • Félix Zogning Nguimeya, professeur agrégé, Département des sciences comptables, Université de Sherbrooke; School of Health and Human Performance, and Assistant Vice-Provost, Equity and Inclusion, Dalhousie University

Activités

Les cinq réunions du Comité consultatif se sont échelonnées d’avril 2021 à juin 2022.

  • Lancement (avril 2021) :
    • Présentation des membres et échanges sur les premières perspectives
    • Adoption du mandat (voir annexe 1) : les membres ont jugé essentiel de changer le nom du Comité pour refléter sa mission, qui au-delà des discussions, concerne la lutte contre le racisme à l’endroit des personnes noires
    • Première discussion sur les priorités des membres
  • Panorama (août 2021) :
    • Présentation des programmes du CRSH (Talent, Savoir et Connexion)
    • Analyse des données : présentation par le CRSH des données comparatives et intersectionnelles sur la participation des étudiantes et étudiants, titulaires de bourses postdoctorales et chercheures et chercheurs noirs à ses programmes
    • Discussion sur les priorités et les premières observations liées aux données.
  • Talent et cheminement professionnel (décembre 2021)
  • Évaluation du mérite (avril 2022)
  • Karine Coen-Sanchez a organisé et modéré une table ronde intitulée Voices of Black Researchers au Congrès des sciences humaines (mai 2022)
  • Recommandations (juin 2022) : résumé des recommandations formulées lors des réunions, des séances de consultation et de l’analyse interne et de la discussion sur le cadre du rapport


La section suivante présente un résumé de certaines observations tirées des données et des discussions du Comité.

Observations

Le CRSH recueille des renseignements de déclaration volontaire pour quelques catégories depuis plusieurs années. En 2018, le CRSH et ses homologues ont adopté une approche de collecte harmonisée des renseignements sur quatre groupes énoncés dans la Loi sur l’équité en matière d’emploi : les femmes, les minorités racisées, les Autochtones et les personnes en situation de handicap. Le formulaire a été révisé en 2019 et des catégories y ont été ajoutées, notamment des sous-catégories pour les minorités racisées, ce qui a généré des données supplémentaires éclairant la présente analyse. Il y a lieu de souligner que la courte période de collecte de données et la petite taille de l’échantillon viennent limiter les conclusions que l’on peut en tirer.

Carrière en recherche des personnes noires

Recensement de la population noire

Des données probantes montrent une érosion du nombre de chercheures et chercheurs noirs à mesure qu’ils progressent dans les étapes d’une carrière en recherche, des préoccupations soulevées par les membres du Comité consultatif ainsi que des membres de la communauté de la recherche noirs en STGMM au Canada Note de bas de page 6; cet enjeu a également été soulevé dans d’autres pays Note de bas de page 7. Les données de Statistique Canada révèlent que la proportion de personnes détenant un diplôme universitaire (toutes disciplines confondues) est inférieure dans la population noire que dans le reste de la population canadienne Note de bas de page 8. Malheureusement, les différences régionales et communautaires ne sont pas suffisamment prises en compte dans les données disponibles et dans les analyses existantes sur la participation des chercheures et chercheurs noirs.

Comme les données nationales ne sont pas toutes accessibles, il est difficile d’évaluer l’équité de l’accès au financement pour la population noire. Les lacunes dans les données provinciales et les pratiques des établissements en matière de données, plus précisément le refus de nombreuses universités de recueillir et de publier des renseignements de déclaration volontaire, sont symptomatiques des obstacles systémiques et essentiels pour les éliminer.

De 2016 à 2021, le recensement canadien a indiqué que le pourcentage de la population du Canada qui s’identifie comme personne noire est passé de 3,5 % à 4,3 %. En 2021, 5,5 % de la population de l’Ontario et 5,1 % de celle du Québec s’identifiait comme personne noire. Ces chiffres pourraient être encore plus élevés compte tenu des difficultés liées à la déclaration volontaire : des personnes noires pourraient déclarer faire partie d’un autre groupe ou ne rien déclarer en raison de la discrimination à l’endroit des personnes noires. Ces facteurs, tout comme d’autres comme l’âge et les disparités régionales, doivent être pris en compte dans une analyse plus approfondie des données du recensement de 2021 récemment publiées. L’objectif principal, quel que soit le nombre spécifique considéré comme représentatif, demeure d’éliminer les obstacles pour toutes personnes noires participantes.

FIGURE 1 – Données de recensement (2021), population noire

4,3%
des Canadiennes et des Canadiens s’identifient comme personnes noires


16%
des personnes de minorité visible s’identifient comme personnes noires


26,5%
des Canadiennes et des Canadiens s’identifient comme personnes de minorité visible

Participation des chercheures et chercheurs noirs aux programmes du CRSH

Le CRSH dispose de données uniquement sur les chercheures, chercheurs, étudiantes et étudiants qui soumettent des demandes à ses programmes. Il n’a pas de renseignements sur les différentes communautés noires et leur participation.

FIGURE 1 – Census data (2021) Black population

La proportion de chercheures et chercheurs noirs qui soumettent des demandes aux programmes du CRSH va de 2,5 % (fonds Nouvelles frontières en recherche, programme interorganismes, 2019) à 3,9 % (subventions Savoir, CRSH, 2021).

Ce taux de participation aux programmes du CRSH illustre la sous-représentation des personnes noires, et l’écart est encore plus marqué dans le domaine des sciences, de la santé et de la technologie. Cette faible représentation des personnes noires dans le monde universitaire les empêche d’accéder et de participer pleinement au système d’éducation Note de bas de page 9. Elle réduit la visibilité de leurs recherches, de leurs contributions et de leurs perspectives dans le milieu universitaire et, par voie de conséquence, contribue à leur isolement au sein des établissements et au manque de soutien des programmes de mentorat. Si cette sousreprésentation est le produit du racisme à l’endroit des personnes noires, il peut aussi s’agir, au sens large, de la manière cyclique que ce racisme se perpétue dans l’écosystème de la recherche plus largement.

Comme le montre la figure 2, dans les programmes du CRSH, les taux d’attribution des minorités visibles sont inférieurs à leurs taux de candidature. Il est plus difficile de dégager la tendance pour les candidatures noires en raison de la petite taille de l’échantillon, mais elle semble similaire. Les taux d’attribution dans ces programmes pour les candidates et candidats qui s’identifient comme personnes noires vont de 1,4 % (subventions de partenariat, 2019) à 3,9 % (Savoir, 2021). Soulignons l’absence de données réelles concernant ces attributions, qui a empêché le Comité de déconstruire les obstacles ayant pu contribuer à ce faible taux de candidature.

Bien que la proportion de chercheures et chercheurs noirs qui présentent une demande à un programme du CRSH et reçoivent du financement se rapproche du pourcentage de personnes noires dans la population (3,5 % en 2016; 4,3 % en 2021), ce taux de participation demeure extrêmement faible.

FIGURE 2 – Taux de candidature et d’attribution des candidates et candidats noirs, par programme du CRSH
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Taux de candidature et d’attribution des candidates et candidats s’identifiant comme personnes noirs

À l’aide de diagrammes à barres, cette figure présente les taux de candidature et d’attribution des candidates et candidats qui s’identifient comme personne noire, par programme du CRSH, au cours des années 2019, 2020 et 2021. La hauteur des barres est mesurée sur l’axe des ordonnées, laquelle s’étend de 0 à 6 %.

Les taux de candidature et d’attribution pour le programme Talent étaient respectivement de 2,8 % et 3,1 % en 2019, 3 % et 3 % en 2020, et 3,3 % et 3,5 % en 2021.

Les taux de candidature et d’attribution pour le programme Savoir étaient respectivement de 3 % et 2,3 % en 2019, 3,6 % et 2,6 % en 2020, et 3,9 % et 3,9 % en 2021.

Les taux de candidature et d’attribution pour les subventions de partenariat étaient respectivement de 2,8 % et 1,3 % en 2019, 3,7 % et 3,3 % en 2020, et 3,9 % et 4,7 % en 2021.

Les taux de candidature et d’attribution pour le fonds Nouvelles frontières en recherche étaient respectivement de 2,5 % et 0 % en 2019, de 2,7 % et 0 % en 2020, et de 2,7 % et 5,3 % en 2021.

Les données sur les titulaires de chaire de recherche du Canada sont un autre indicateur de la sous-représentation des personnes noires dans l’écosystème de la recherche. Dans l’ensemble, seulement 1,96 % des titulaires de chaire (n=39) dans tous les domaines s’identifient comme personnes noires. La plupart de ces titulaires de chaire travaillent dans le domaine des sciences humaines, les seuls domaines financés par les trois organismes fédéraux au sein desquels les chercheures et chercheurs noirs ne sont pas sous-représentés (voir figure 5).

Participation des chercheures et chercheurs noirs par discipline

On constate que les chercheures et chercheurs noirs ne se répartissent pas également dans les différentes disciplines des sciences humaines. Selon les données sur les candidatures, on retrouve davantage d’universitaires noirs en travail social, en sociologie et en éducation qu’en philosophie, que dans les beaux-arts et qu’en psychologie. Dans l’ensemble, il semble y avoir une plus grande participation en sciences sociales qu’en sciences humaines (figure 3 – Taux de candidature par discipline), et les taux d’attribution suivent la même tendance. La variation entre ces deux taux, conjuguée à un mécanisme de suivi supplémentaire, pourrait servir à évaluer les obstacles systémiques dans certaines disciplines.

FIGURE 3 – Taux de candidature par discipline
Description of image
Différence du taux de candidature entre les candidates et candidats s’identifiant comme personnes noires et celles et ceux ne s’identifiant pas comme personnes de minorité visible, par disciplines principales

Cette boîte verticale présente 21 lignes, chacune contenant le nom d’une discipline universitaire des sciences humaines. Le titre suivant apparaît au-dessus de la liste : Différence du taux de candidature entre les candidates et candidats s’identifiant comme personnes noires et celles et ceux ne s’identifiant par comme personnes de minorité visible, par disciplines principales.

Les cinq principaux domaines dans lesquels les taux de candidature des personnes noires sont plus élevés que ceux des personnes n’appartenant pas à une minorité visible sont : la sociologie (différence de 4,18 points); le travail social (différence de 4,17 points); l’éducation (différence de 3,78 points); les sciences politiques (différence de 2,93 points); les sciences administratives, la gestion des affaires et le commerce (différence de 2,47 points).

Puis se sont les études interdisciplinaires (différence de 2,29 points), le droit (différence de 2,07 points), la géographie (différence de 1,29 points) et la science économique (différence de 0,72 points).

La liste se poursuit avec les domaines où les taux de candidature des personnes noires sont inférieurs à ceux des personnes n’appartenant pas à une minorité visible : la criminologie (différence de -00,9 points); la littérature et les langues modernes (différence de -0,50 points); les études religieuses (différence de -0,54 points); la linguistique (différence de -0,83 points); l’urbanisme, l’aménagement régional et les études environnementales (différence de -1,10 points); l’anthropologie (différence de -1,41 points); l’archéologie (différence de -1,60 points).

Les cinq domaines présentant la plus grande différence de points entre les taux de candidature des personnes noires et des personnes n’appartenant pas à une minorité visible sont : l’histoire (différence de -1,88 points); les communications et les études des médias (différence de -2,01 points); la philosophie (différence de -3,16 points); les beaux-arts (différence de -4,11 points); la psychologie (différence de -6,02 points).

FIGURE 4 – Taux d’attribution par discipline
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Cette boîte verticale présente 21 lignes, chacune contenant le nom d’une discipline universitaire des sciences humaines. Le titre suivant apparaît au-dessus de la liste : Différence du taux d’attribution entre titulaires s’identifiant comme personnes noires et celles et ceux ne s’identifiant par comme personnes de minorité visible, par disciplines principales.

Les cinq principaux domaines dans lesquels les taux d’attribution des personnes noires sont plus élevés que ceux des personnes n’appartenant pas à une minorité visible sont : la sociologie (différence de 4,69 points); les sciences administratives, la gestion des affaires et le commerce (différence de 3,97 points); la géographie (différence de 3,04 points); l’éducation (différence de 2,99 points); le travail social (différence de 2,86 points).

Puis se sont les études interdisciplinaires (différence de 2,35 points), le droit (différence de 1,34 points), les sciences politiques (différence de 0,92 points) et la littérature et les langues modernes (différence de 0,49 points).

La liste se poursuit avec les domaines où les taux d’attribution des personnes noires sont inférieurs à ceux des personnes n’appartenant pas à une minorité visible : la science économique (différence de -0,11 points); la littérature et les langues modernes (différence de -0,50 points); les études religieuses (différence de -0,25 points); les communications et les études des médias (différence de -0,90 points); la criminologie (différence de -1,15 points); la linguistique (différence de -1,42 points); l’archéologie (différence de -1,44 points); l’anthropologie (différence de -1,59 points).

Les cinq domaines présentant la plus grande différence de points entre les taux d’attribution des personnes noires et des personnes n’appartenant pas à une minorité visible sont : l’urbanisme, l’aménagement régional et les études environnementales (différence de -1,95 points); l’histoire (différence de -2,23 points); la philosophie (différence de -2,23 points); les beaux-arts (différence de -3,86 points); la psychologie (différence de -4,81 points).

Obstacles systémiques à l’accessibilité

Conception et exécution des programmes

En tant qu’organisme subventionnaire, le CRSH est limité dans sa capacité à faciliter l’accès à l’écosystème de recherche pour les étudiantes et étudiants noirs, puisqu’il offre un soutien financier seulement à partir des cycles supérieurs, et parce que les organismes subventionnaires n’ont aucun contrôle direct sur les politiques institutionnelles relatives au corps étudiant (admission, mentorat, etc.) ainsi qu’à l’embauche et à l’octroi de promotions. Néanmoins, les conseils subventionnaires peuvent imposer des exigences aux individus et aux établissements quant à l’admissibilité au financement, de même que dans le cadre des protocoles d’entente avec les établissements postsecondaires qui ont le rôle de partenaires dans l’administration des attributions.

Voici quelques options proposées par le Comité :

  • Offrir de nouvelles bourses d’études et de recherche réservées aux étudiantes et étudiants et aux stagiaires postdoctoraux noirs
  • Obliger les établissements à mettre en place un cadre semblable à celui du Plan d’action en matière d’équité, de diversité et d’inclusion du Programme des chaires de recherche du Canada, afin que les processus internes de sélection soient transparents et ouverts (pour les programmes de bourses d’études interorganismes tels que les bourses de maîtrise et les bourses de doctorat du Programme des bourses d’études supérieures du Canada, les bourses d’études supérieures du Canada Vanier et les bourses postdoctorales Banting)
  • Créer un prix d’excellence pour les chercheures et chercheurs noirs
  • Ajouter une cible pour les titulaires de chaire de recherche du Canada noirs au sein des cibles pour les minorités visiblests

En outre, pour certains programmes, comme le Programme de bourses d’études supérieures du Canada et le Programme des chaires de recherche du Canada, l’évaluation du mérite est une responsabilité partagée entre le CRSH et les établissements d’enseignement postsecondaire. Dans le cas des bourses de maîtrise du Programme des bourses d’études supérieures du Canada, cette responsabilité a été confiée aux établissements; pour ce qui est des bourses de doctorat du Programme des bourses d’études supérieures du Canada, les établissements présélectionnent des candidates et des candidats qui pourront ensuite participer au concours national géré par le CRSH. En ce qui concerne le Programme des chaires de recherche du Canada, la sélection revient également à l’établissement, mais c’est le CRSH qui détermine si les candidatures répondent aux critères d’excellence du programme.

Par le passé, la participation des personnes de minorité visible au Programme des chaires de recherche du Canada était plus faible que prévu en raison des obstacles systémiques à l’accessibilité. En 2017, il a fallu mettre en place des exigences précises afin de garantir l’ouverture et la transparence des processus de sélection, en plus d’établir des cibles pour les groupes désignés. Cette expérience pourrait indiquer la présence d’obstacles semblables dans les programmes de bourses, et la nécessité d’envisager de fixer des cibles pour les chercheures et chercheurs noirs.

FIGURE 5 – Titulaires de chaire de recherche du Canada noirs
Titulaires de chaire active du programme des Chaires de recherche du Canada (n=1 992) s’identifiant comme personnes noires (n=39), par organisme (Septembre 2022)
IRSC CRSNG CRSH Total
Nombre total de titulaire par organisme 740 771 481 1 992
Personnes noires (n=39) 0,95 % 1,30 % 4,57 % 1,96 %

Il n’existe aucune donnée sur la participation des étudiantes et étudiants noirs aux bourses de maîtrise du Programme des bourses d’études supérieures du Canada puisque les établissements ne recueillent pas de données de déclaration volontaire. Néanmoins, il y a une légère différence entre le taux de candidature et le taux d’attribution de l’ensemble des minorités visibles, signe de la présence d’obstacles systémiques à la réussite. Les données disponibles relatives au doctorat indiquent une différence de 3 %, un pourcentage plutôt faible compte tenu des données du dernier recensement.

FIGURE 6 – Bourses de doctorat : taux de candidature et d’attribution des candidates et candidats noirs
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Taux de candidature et d’attribution des candidates et candidats s’identifiant comme personnes noires
Bourses de doctorat du CRSH et bourses de doctorat du Programme de bourses d’études supérieures du Canada

À l’aide d’un diagramme à barres, cette figure présente les taux de candidature et d’attribution des candidates et candidats qui s’identifient comme personne noire, dans le cadre des bourses de doctorat du CRSH et des bourses de doctorat du Programme de bourses d’études supérieures du Canada, au cours des années 2019, 2020 et 2021. La hauteur des barres est mesurée sur l’axe des ordonnées, laquelle s’étend de 0 à 6 %.

Les taux de candidature et d’attribution pour les bourses de doctorat du CRSH et des bourses de doctorat du Programme de bourses d’études supérieures du Canada étaient respectivement de 2,8 % et 3,5 % en 2019, 3,3 % et 3,3 % en 2020, et 3,2 % et 3,5 % en 2021.

Actuellement, le CRSH ne propose pas d’aide financière directe au premier cycle (contrairement au Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie), le seul soutien au premier cycle étant offert indirectement sous forme de subventions de recherche utilisées par les chercheures et chercheurs pour fournir un salaire et des allocations à des étudiantes et étudiants de tous les niveaux. L’accès aux études supérieures et à l’appui à la recherche repose ainsi sur une chercheure principale ou un chercheur principal financé par le CRSH. La sous-représentation des chercheures et chercheurs noirs en milieu universitaire engendre aussi un manque de mentors noirs, ce qui représente un obstacle systémique pour les étudiantes et étudiants noirs. Il est à noter que, dans son budget de 2022, le gouvernement fédéral a annoncé l’attribution, en 2022 et 2023, de bourses d’études réservées aux étudiantes et étudiants noirs au baccalauréat, à la maîtrise, au doctorat et au postdoctorat et distribuées entre les organismes, reconnaissant ainsi l’importance d’investir pour s’attaquer aux obstacles systémiques et au racisme à l’endroit des personnes noires. Ce geste revient également à reconnaître la nécessité de s’attaquer aux obstacles liés aux allocations de fonds aux communautés noires.

Le CRSH s’associe à des établissements pour de nombreuses offres de financement, surtout celles qui visent à soutenir la carrière des scientifiques, comme les bourses d’études et le Programme des chaires de recherche du Canada. Les exigences complémentaires à la fixation d’objectifs mis en place dans le cadre du Programme des chaires de recherche du Canada, comme les plans d’action en matière d’EDI des établissements et la mise en œuvre de processus de sélection de candidatures transparents, justes et ouverts, ont démontré la capacité de l’organisme à influencer positivement l’écosystème de la recherche. Ces initiatives mériteraient d’être transposées à d’autres programmes pour contribuer à la sensibilisation aux obstacles spécifiques auxquels sont confrontés les chercheures et chercheurs noirs et pour élaborer des politiques institutionnelles visant à éliminer ces obstacles et mieux épauler les chercheures et chercheurs noirs.

Fardeau administratif

Les récents événements mondiaux et de nouveaux appels à l’action en matière d’EDI ont poussé les établissements d’enseignement postsecondaire canadiens à se pencher sur la faible proportion de personnes noires au sein de leur corps professoral. En 2018, l’Association canadienne des professeures et professeurs d’université a publié un rapport intitulé Éducation postsecondaire : qu’en est-il de la diversité et de l’équité au sein du corps professoral?Note de bas de page 10 qui révèle que les personnes noires ne représentent que 2,0 % du corps professoral universitaire, et que la proportion est encore moindre chez les cadres supérieurs.

La Charte de Scarborough sur la lutte contre le racisme et l’inclusion des personnes noires dans l’enseignement supérieur au Canada (principes, actions et responsabilités) Note de bas de page 11, fruit d’un dialogue national et d’un événement de mobilisation rassemblant des chefs de file de l’enseignement supérieur de partout au pays, réclame spécifiquement une augmentation du nombre de cadres supérieurs noirs dans les universités.

Le Comité a discuté de l’importance de cette charte et de l’incidence de ses recommandations sur les candidates et candidats admissibles et sur les bénéficiaires du CRSH. Plus précisément, le Comité a remarqué que les chercheures et chercheurs noirs d’excellence qui méritent de recevoir une bourse du CRSH sont souvent appelés à occuper des postes administratifs de haut niveau, en particulier dans le domaine de l’EDI. Vu le petit nombre de professeures et professeurs noirs dans les universités du pays, cette situation est inévitable. Par conséquent, toute clause ou contrainte du CRSH imposée aux titulaires de bourse les rendant inadmissibles à d’autres bourses doit être réexaminée afin d’éviter qu’elles aient pour effet collatéral de freiner des possibilités de promotion au sein de leur établissement pour ces chercheures et chercheurs.

Reconnaissance et visibilité

Le Comité a souligné le rôle important que le CRSH doit jouer dans la promotion de l’excellence en recherche des personnes noires, rôle qui peut se manifester de plusieurs façons.

Évaluation du mérite

Membres de comité de sélection noirs

Il n’y a pas assez de chercheures et chercheurs noirs qui participent au processus d’évaluation du mérite; la proportion de personnes noires siégeant à des comités d’évaluation (2,3 %) est plus faible que la proportion totale de candidatures noires (3 %). Il convient de noter que malgré sa faiblesse, ce taux montre la charge supplémentaire dans l’évaluation du mérite des chercheures et chercheurs noirs, qui ne représentent que 2 % du corps professoral (comme mentionné précédemment). Ce sont donc 40 personnes noires qui siègent aux comités de sélection du CRSH, et seulement 20 % de ces comités comptent au moins un membre noir, ce qui s’inscrit dans la tendance observée dans les données sur les personnes racisées (excluant les personnes noires). De façon générale, plus d’hommes noirs que de femmes noires ont été recrutés (petit échantillon).

La diversité au sein des comités est un facteur favorable au succès des candidates et candidats noirs. Les données sont certes limitées, mais elles appuient les résultats qualitatifs indiquant que la diversité du comité de sélection favoriserait l’ouverture à un éventail de perspectives et d’approches.

Taux de candidature des chercheures et chercheurs noirs

Beaucoup de chercheures et chercheurs noirs font état d’une évaluation inadéquate de leur proposition de recherche et de préjugés dans le processus d’évaluation du mérite, dont les comités comptaient une représentation insuffisante de personnes noires. Bien que la différence entre le taux de candidature et le taux d’attribution soit négligeable (figure 2), le taux de participation, lui, est très bas. Il est admis que les chercheures et chercheurs noirs hésitent à participer et à poser leur candidature, compte tenu de différents facteurs comme les rejets historiques, le manque de soutien de la part des établissements et la méconnaissance des comités de révision par rapport à leur expertise et à leur domaine de recherche. Le classement moyen des demandes de subvention des chercheures et chercheurs noirs se situe légèrement en dessous (3,87 sextiles) de celui des personnes qui ne sont pas noires (3,53 sextiles).

De plus en plus d’analyses mettent en évidence l’existence de préjugés dans les évaluations du mérite. Même si les données de déclaration volontaire sont confidentielles et ainsi jamais divulguées aux membres des comités d’évaluation du mérite, il arrive que ces renseignements soient publics ou déduits du contenu des demandes. Pour éliminer ces obstacles, il est essentiel de former les membres des comités d’évaluation du mérite, d’accroître la diversité de ces comités et de resserrer les exigences en matière d’EDI dans l’évaluation des programmes de recherche.

Études noires

Outre les préoccupations relatives à la participation et au succès des chercheures et chercheurs noirs dans le processus d’évaluation du mérite, les membres du Comité ont exprimé d’autres réserves concernant l’évaluation d’études noires et les préjugés envers ce domaine de recherche.

Le domaine des études noires porte sur l’expérience de vie de personnes d’ascendance africaine et caribéenne, et son analyse est ancrée dans le vécu historique des communautés noires. Ce domaine de recherche, qui gagne en popularité, est de plus en plus reconnu dans les universités du pays (Francis, 2019), grâce au travail de plusieurs chercheures et chercheurs noirs Note de bas de page 12 (Cooper, 2007; Bernard, 2006; Nelson, 2011) et à une hausse de la demande étudiante (Benchetrit, 2021).

Les programmes d’étude noires dans les collèges et les universités s’articulent autour de l’expérience des personnes noires (expérience passée et présente et aspirations pour l’avenir) dans toute sa diversité, sa complexité et sa richesse. En parcourant quelques sites Web universitaires (p. ex. Dalhousie, Queen’s, Trent, York, Toronto), on découvre un domaine d’études interdisciplinaire dont les programmes sont axés sur différentes facettes des expériences sociohistoriques et actuelles des personnes d’ascendance africaine : arts, culture, éducation, langues, économie, politique, genres et sexualités, santé, sciences, vie sociale et bien-être, et plus encore. Ce domaine et ses axes de recherche sont à l’image de la diversité des communautés noires, et l’évaluation du mérite des demandes dans ce domaine devrait s’appuyer sur une expertise adéquate et tout aussi diversifiée.

Il faut se rappeler que, dans les études noires, on n’aborde pas l’intégration ni l’assimilation à la culture dominante. Ici, il est nulle question de politiques de la tour d’ivoire ou de sujets ésotériques et paroissiaux. Ces études s’inscrivent avant tout dans une tradition savante, un paradigme intellectuel d’autodétermination et de contre-insurrection par rapport à la suprématie blanche, au racisme à l’endroit des personnes noires, au colonialisme et au néocolonialisme des personnes d’ascendance africaine, peu importe où ils vivent. La légitimité de ce domaine d’étude réside dans l’analyse critique des besoins matériels de l’ensemble des personnes noires, et non dans le libéralisme blanc ou ses établissements désignés.

Recommandations

Les recommandations du Comité consultatif de lutte contre le racisme à l’endroit des personnes noires dans les programmes de recherche et de formation en recherche s’inscrivent dans le cadre suivant (figure 7) :

  1. Un accès équitable à l’appui à la recherche : l’élimination des obstacles systémiques dans la conception des programmes.
  2. Une participation équitable au système de la recherche : un aperçu plus général du financement de la recherche, des obstacles systémiques qui y sont associés et du contexte de la recherche, de même que la reconnaissance des établissements en tant que moteurs de changement.
  3. Des pratiques et méthodes de recherche qui intègrent l’EDI : la définition des critères d’excellence en recherche.
  4. De nouvelles connaissances en EDI issues de la recherche en sciences humaines.
  5. La promotion de la diversité et de l’inclusion par le CRSH : le personnel doit en être le reflet. La diversité des compétences et des expériences vécues fait partie du processus de démantèlement des obstacles systémiques.
FIGURE 7 – Cadre pour la formulation des recommandations
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L’Approche du CRSH pour favoriser l’EDI dans les travaux de recherche
  1. Un accès équitable à l’appui à la recherche
  2. Une participation équitable au système de la recherche
  3. Des pratiques et méthodes de recherche qui intègrent l’EDI
  4. De nouvelles connaissances issues de la recherche en sciences humaines font avancer l’EDI dans la société
  5. Un milieu de travail diversifié et inclusif

Un accès équitable à l’appui à la recherche

Il s’agit d’assurer la pleine participation des chercheures et chercheurs noirs aux occasions de financement du CRSH en leur apportant un soutien ciblé, en éliminant les préjugés dans l’évaluation du mérite et en valorisant l’excellence des scientifiques noirs. Par conséquent, le Comité recommande au CRSH de prendre les mesures suivantes :

Recueillir de meilleures données
  • Continuer le suivi des taux de candidature et d’attribution pour les chercheures et chercheurs noirs, explorer l’option de collecter davantage de données auprès de cette population et étendre l’analyse de données par des études comparatives avec d’autres groupes, puis publier ces données lorsqu’elles sont disponibles.
  • Soutenir la recherche sur les données disponibles visant à repérer les obstacles systémiques dans l’écosystème menée par des chercheures et chercheurs noirs afin d’orienter l’élaboration de politiques.
  • Explorer les critères qui pourraient servir à fixer les objectifs de financement et tiendraient compte de la diversité de la communauté.
  • Financer une étude sur les demandes de subventions de chercheures et chercheurs noirs non retenus pour orienter la mise en place d’autres mesures de soutien.
Offrir des bourses réservées aux chercheures et chercheurs noirs
  • Favoriser l’inclusion des étudiantes et étudiants noirs à la recherche grâce à des bourses de recherche de 1er cycle
  • Offrir des bourses spécialisées.
  • Envisager d’offrir des suppléments aux bourses pour les chercheures et chercheurs noirs, compte tenu des obstacles à l’accessibilité aux études supérieures.
  • Étoffer la rétroaction donnée aux personnes noires qui font une demande de bourse d’études pour les aider à étayer leur candidature.
  • Examiner la possibilité d’augmenter le nombre de chaires de recherche du Canada attribuées à des chercheures et des chercheurs noirs.
Soutenir la recherche menée par des chercheures et chercheurs noirs
  • Financer une étude sur les demandes de subventions de chercheures et chercheurs noirs non retenus pour orienter la mise en place d’autres mesures de soutien.
  • Fixer une cible de financement de la recherche de candidates et candidats noirs dans le cadre des concours.
Éliminer les préjugés contre les chercheures et chercheurs noirs et l’étude noires dans l’évaluation du mérite
  • Éliminer les préjugés contre les chercheures et chercheurs noirs et l’étude noires dans l’évaluation du mérite
    • En collaboration avec les établissements d’enseignement postsecondaire, trouver des membres de comité de sélection potentiels et dresser une liste de spécialistes.
    • Mettre en œuvre des politiques qui favoriseront l’ouverture des appels à la participation au processus.
    • Élaborer une approche de recrutement inclusive pour le recrutement des membres de comité de sélection qui invitera les chercheures et chercheurs moins expérimentés à participer au processus.
    • Revoir l’Énoncé de politique des trois conseils : Éthique de la recherche avec des êtres humains – EPTC 2 afin d’y mentionner la discrimination envers les chercheures et chercheurs noirs.
  • Revoir les formations et les lignes directrices pour les membres et la présidence des comités de sélection afin de mettre un accent particulier sur le racisme à l’endroit des personnes noires et sur les études noires.
  • Rendre obligatoire la formation sur le racisme à l’endroit des personnes noires.
  • Revoir l’Énoncé de politique des trois conseils : Éthique de la recherche avec des êtres humains – EPTC 2 afin d’y mentionner la discrimination envers les chercheures et chercheurs noirs.
  • Étudier la faisabilité de la création d’un comité d’évaluation du mérite consacré aux études noires dans le cadre de certaines occasions de financement.
  • Réviser le module portant sur les préjugés inconscients en matière d’EDI des trois organismes afin de mettre l’accent sur le racisme à l’endroit des personnes noires.
Promouvoir l’excellence en recherche
  • Créer de nouveaux prix d’excellence en recherche et en études noires réservés aux chercheures et chercheurs noirs.
  • Augmenter la visibilité des étudiantes, étudiants, chercheures et chercheurs noirs de même que de leurs recherches dans les plans de communication, les produits issus de la recherche et les publications.

Participation équitable au sein de l’écosystème de la recherche

Afin d’éliminer le racisme à l’endroit des personnes noires des établissements et de l’écosystème de recherche, il est essentiel d’examiner les mécanismes de financement de la recherche dans leur ensemble en vue de repérer les obstacles systémiques qui bloquent l’accès au financement. Par conséquent, le Comité recommande au CRSH de prendre les mesures suivantes :

  • Exprimer ses attentes aux établissements en ce qui concerne l’augmentation de la participation des groupes sous-représentés, particulièrement les chercheures et chercheurs noirs, aux occasions de financement liées aux bourses et la bonification des subventions pour le corps étudiant noir (allocations, postes d’assistanat en recherche).
  • Obliger les établissements à mettre en place, par eux-mêmes ou en collaboration avec le CRSH, des programmes de mentorat, par exemple du soutien destiné au personnel des bureaux de la recherche.
  • Définir les exigences en matière d’EDI dans le processus de sélection internes des bénéficiaires de bourses d’études ou de bourses de recherche et de titulaires de chaire dans les établissements d’enseignement postsecondaire.
  • Envisager un processus qui permettrait aux candidates et candidats de contester les décisions des comités de recherche de leur établissement et de s’adresser directement au CRSH.

Des pratiques et méthodes de recherche qui intégrent l’EDI

Le CRSH a déjà des lignes directrices pour une évaluation appropriée de la recherche, notamment pour la formation et l’intégration de l’EDI dans la conception et les pratiques de la recherche. Il existe plusieurs leviers d’intégration de l’EDI dans les pratiques de recherche : l’accroissement de la diversité dans la composition des équipes et le recrutement des stagiaires, la promotion d’un environnement de travail équitable, inclusif et accessible en recherche pour les membres de l’équipe et les stagiaires et l’accent sur la diversité et l’équité dans le mentorat, la formation et l’accès aux occasions de perfectionnement. L’intégration de l’EDI dans la conception de la recherche consiste quant à elle à adopter des approches de conception comme l’intersectionnalité, l’analyse comparative entre les sexes plus (ACS+), la lutte contre le racisme, la collecte de données non regroupées et l’analyse intégrant des critères identitaires (âge, culture, situation de handicap, éducation, ethnicité, expression de genre et identité de genre, statut d’immigrant ou de nouvel arrivant, identité autochtone, langue, neurodiversité, responsabilité ou statut parental, lieu de naissance, religion, race, orientation sexuelle, statut socio-économique, etc.)

  • Revoir les lignes directrices en matière d’EDI dans la conception et la pratique de la recherche sous l’angle de la lutte contre le racisme à l’endroit des personnes noires.
  • Élaborer des lignes directrices pour l’évaluation du mérite des études noires.

Financer de nouvelles recherches pour lutter contre le racisme à l’endroit des personnes noires dans la société et soutenir les études noires

Le CRSH finance une quantité considérable de travaux sur des sujets qui, étant liés à l’EDI, peuvent avoir des retombées sur la société en général, comme l’Initiative sur la race, le genre et la diversité lancée en 2021. Il peut également conjuguer l’analyse de données textuelles à sa base de données sur la recherche financée pour mieux comprendre l’histoire et l’évolution de certains sujets de recherche. Les chercheures et chercheurs noirs contribuent souvent directement à la définition des concepts et de la théorie de la recherche sur l’EDI et le racisme à l’endroit des personnes noires.

Le CRSH peut exprimer sa volonté de comprendre les expériences vécues des membres de la diaspora noire en offrant tout un éventail d’occasions de financement pour permettre et promouvoir la découverte de réalités intersectionnelles et fragmentées. Ainsi, il serait possible d’explorer d’autres sujets pour comprendre l’identité noire au-delà des thèmes généralement abordés en études noires. Le CRSH pourrait financer des organismes noirs qui travaillent en partenariat avec des universitaires noirs pour renforcer les études noires et la lutte contre le racisme d’un point de vue communautaire.

Il existe peut-être des occasions de faire progresser les trois objectifs de la Décennie internationale des personnes d’ascendance africaine: attirer l’attention sur les droits des personnes d’ascendance africaine; mener des recherches pour lutter contre le racisme à l’endroit des personnes noires; mobiliser les connaissances pour promouvoir un plus grand respect de l’héritage, de la culture et des contributions diverses des personnes d’ascendance africaine.

  • Lancer une occasion de financement réservée aux études noires
  • Financer la recherche sur le racisme à l’endroit des personnes noires

Un milieu de travail diversifié et inclusif

Au CRSH, la diversité et l’inclusion en milieu de travail sont des objectifs explicites. Les membres du personnel se sentent liés à la communauté financée par le CRSH et comptent dans leurs rangs plusieurs spécialistes en EDI. Néanmoins, les membres du personnel noirs relèvent des problèmes concernant l’inclusion et l’environnement de travail. Le Comité a discuté du rôle essentiel du personnel de recherche noir dans le soutien au corps professoral. Les membres du Comité ont dit avoir vu des membres du personnel noirs réduits au silence dans leur établissement qui, même en présence d’autres membres du personnel noirs, n’osent pas réclamer de changements par crainte de représailles, notamment en ce qui concerne leur emploi.

Puisque le personnel noir de l’ensemble du milieu universitaire semble unanime sur le risque de promouvoir l’innovation en matière d’EDI, le Comité suggère fortement au CRSH de procéder à une analyse interne; l’organisme a vraisemblablement des efforts à déployer pour assurer la représentation et l’inclusion du personnel noir à tous ses échelons. Il s’agit d’un travail aussi important que le soutien de la communauté des chercheures et chercheurs noirs. Le personnel du CRSH joue un rôle important dans la conception des programmes et le processus d’évaluation du mérite, et l’organisme compte sur la présence de personnes noires, leur expertise, leurs connaissances et leurs expériences. L’accès aux échelons supérieurs, par exemple la présence de hautes dirigeantes et hauts dirigeants dont le travail serait axé sur l’EDI, est une condition sine qua non d’un changement de culture et du climat d’attribution des bourses au CRSH. Par conséquent, le Comité recommande au CRSH de prendre les mesures suivantes, à l’interne :

  • Offrir les formations nécessaires sur le racisme à l’endroit des personnes noires.
  • Garantir le recrutement et l’inclusion de personnes noires à tous les échelons de l’organisme, particulièrement aux échelons supérieurs, et au conseil d’administration.


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