Favoriser la résilience par une participation valable

Un projet de recherche permet d’autonomiser des jeunes recevant des services en santé mentale durant la pandémie

Détail d’un masque créé par un jeune en réponse à la question suivante : comment vois-tu les enfants et les jeunes que l’on dit avoir des troubles de santé mentale?

Photo : Maria Liegghio

S’il a beaucoup été question des répercussions de la pandémie de COVID-19 sur la santé mentale des enfants et des jeunes, on a peu parlé des nombreux moyens auxquels les jeunes ont eu recours pour trouver la force de traverser cette période on ne peut plus stressante et éprouvante.

Par ses nouveaux travaux financés par le CRSH, Maria Liegghio, professeure agrégée à l’École de travail social de l’Université York, tente de comprendre leur résilience et les facteurs qui y contribuent. Ses travaux aideront les intervenants sociaux à mieux soutenir les jeunes quand survient une situation de crise ainsi que tout au long de la période qui suivra la pandémie.

En connaissant mieux les facteurs protecteurs qui aident les enfants et les jeunes au sein de leur famille, de leur collectivité et de la société en général, il est possible de concevoir de meilleurs services pour leur permettre de rebondir face aux difficultés, estime Maria Liegghio.

Persévérance en cotexte de pandémie

L’équipe de Maria Liegghio s’est employée à cerner la nature, l’influence et les répercussions d’ordre social de la pandémie de COVID-19 sur la résilience des enfants, des jeunes et de leur famille. Les travaux ont également examiné comment les établissements et les services d’aide – organismes œuvrant en santé mentale, établissements d’enseignement, services de protection de l’enfance et corps policiers – s’en sont tirés durant la pandémie et ont modifié leurs services de manière à favoriser la résilience.

Les deux provinces qui ont connu le plus grand nombre d’infections et de décès attribuables à la COVID-19, soit le Québec et l’Ontario, ont été retenues à des fins de comparaison, et des analyses ont été exécutées à l’échelle locale et régionale à Gatineau et Ottawa ainsi que dans la région de Peel. Dans le cadre du projet, l’équipe de recherche a invité des jeunes psychiatrisés (c’est-à-dire qui reçoivent des services en santé mentale) à faire partie d’équipes consultatives – dans la région de Peel dans un premier temps, une autre équipe étant prévue au Québec par la suite – et à aider à interviewer des fournisseurs de soins et de services ainsi qu’à recruter des travailleuses et travailleurs en santé mentale pour les enfants et les jeunes.

Le projet est toujours en cours, mais les premières constatations indiquent que le projet lui-même constitue une source extraordinaire de résilience pour les jeunes qui y participent. En leur offrant la possibilité de contribuer de façon valable à une cause importante – l’amélioration des expériences des autres en matière de santé mentale – les réunions de l’équipe de recherche ont été sources de bien-être pour les jeunes et les ont incités à créer une communauté virtuelle qui se réunit toutes les semaines pour échanger des points de vue et faire avancer les travaux de recherche.

Cet effet thérapeutique est réconfortant mais pas surprenant, selon Maria Liegghio : il était voulu de par la conception même de la recherche.

Masques créés par des jeunes dans le cadre du projet de recherche mené avec Maria Liegghio en réponse à la question 1 : montre comment tu vois les enfants et les jeunes que l’on dit avoir des troubles de santé mentale et à la question 2 : montre comment tu penses que les autres voient les enfants et les jeunes que l’on dit avoir des troubles de santé mentale.

Photos : Maria Liegghio

Autonomisation par la participation

Pour concevoir la recherche, Maria Liegghio a puisé dans son expérience du travail social, qui lui a permis de se faire une idée très nette de ce qui fonctionne pour œuvrer auprès des jeunes et comprendre leur vécu en santé mentale. Sa démarche tient compte du pouvoir de la participation : les répercussions positives possibles du fait d’étudier avec les enfants et les jeunes plutôt que de les étudier elles et eux. Cette démarche a été porteuse de sens pour les jeunes qui ont participé à la recherche et leur a apporté de la résilience.

En dépit des effets néfastes que la pandémie avait sur les jeunes et leur santé mentale, elles et ils se sont présentés aux réunions de l’équipe, et ce, même les jours les plus difficiles. Lors d’une étude antérieure qui comportait le même élément de participation, Maria Liegghio avait observé que les jeunes venaient aux réunions mais pouvaient manquer leurs rendez-vous avec leur intervenant. Tout cela, pense-t-elle, laisse supposer qu’il faut soutenir ces jeunes en tant que citoyennes et citoyens et non en tant que jeunes psychiatrisés.

Modèle de recherche-action participative

Depuis sa création dans le cadre du projet de recherche de Maria Liegghio, la communauté virtuelle a évolué. On envisage de relier les participantes et participants de l’Ontario et du Québec et d’organiser un sommet de la jeunesse pour examiner des questions connexes.

La nature virtuelle de ces réunions – imposée par les restrictions auxquelles la pandémie a donné lieu – est devenue un atout et a élargi encore davantage le rayonnement de la communauté. Celle-ci pourrait inclure des jeunes du Salvador, où Maria Liegghio mène un projet similaire qui porte sur le phénomène de la résilience par-delà les frontières et les cultures et met l’accent sur la manière dont les gens réagissent aux répercussions des traumatismes et de la violence.

Les travaux de Maria Liegghio non seulement se traduisent par des avantages pour les fournisseurs de services, mais ils offrent également un modèle pour des études sociologiques ou critiques sur la santé mentale des enfants et des jeunes en tant que phénomène politique.

Le changement social vient de la base, dit Maria Liegghio. L’action et le changement ont plus de chances de se produire quand les solutions viennent des personnes et des collectivités qui sont les plus touchées par un problème.

En savoir plus

Pour en savoir plus sur les travaux de Maria Liegghio et sur ses publications, on peut consulter son profil (en anglais) sur le site Web de l’Université York.