Pandémie et bien-être

Eve Pouliot
Université de Québec à Chicoutimi

Stratégies pour aider les ados exposés à des catastrophes naturelles pendant la pandémie

Examen des effets cumulatifs des traumatismes sur leur santé mentale

La pandémie de COVID-19 a bouleversé notre monde. À cet égard, on peut certainement la qualifier de catastrophe. Et comme un malheur arrive rarement seul, les catastrophes naturelles se sont enchaînées partout. L’impact de ces chocs est au cœur des travaux de recherche d’Eve Pouliot, professeure agrégée au Département des sciences humaines et sociales de l’Université du Québec à Chicoutimi (UQAC), qui s’intéresse à la santé mentale des jeunes dans des contextes d’adversité. À ce jour, peu d’études ont abordé les répercussions d’événements traumatisants sur le bien-être et la capacité de résilience des adolescentes et adolescents.

En collaboration avec Danielle Maltais (UQAC) ainsi que Christine Gervais et Kristel Tardif-Grenier (Université du Québec en Outaouais), Eve Pouliot dirige une étude menée dans deux écoles secondaires de l’Outaouais pour documenter le vécu d’élèves exposés à un cumul d’événements stressants, incluant des inondations et des tornades pendant la pandémie. « Avec la fermeture des écoles pendant la pandémie, les jeunes ont perdu leur lieu de rassemblement et se sont retrouvés isolés », déplore Eve Pouliot.

À ces épreuves ont pu s’ajouter d’autres situations difficiles, comme un deuil, une séparation, un déménagement. Une telle suite d’événements éprouvants peut exacerber les vulnérabilités individuelles des jeunes et représenter des facteurs de risque pour le développement de problèmes de santé mentale.

Pour mieux soutenir les jeunes, d’abord les écouter

Eve Pouliot et son équipe cherchent à documenter les stratégies d’adaptation et de résilience individuelles afin de concevoir des outils d’intervention qui pourront aider les jeunes, notamment les jeunes qui habitent en région rurale où l’accès aux services est limité. Ces outils seront partagés avec les directions des écoles.

Les jeunes sont plus susceptibles de vivre les impacts négatifs d’une catastrophe naturelle, mais il est rare que l’on s’adresse à eux. Les intervenantes et intervenants psychosociaux vont travailler davantage avec les parents, présumant qu’une fois aidés, les parents seront en mesure de soutenir leurs enfants. Or, ce n’est pas toujours le cas. « Il faut donner une voix aux jeunes, afin de bien comprendre leurs besoins et de leur offrir un soutien adapté à leur réalité d’ado », indique Eve Pouliot.

Dans un contexte de changements climatiques où les catastrophes naturelles deviendront de plus en plus fréquentes, il s’agit d’une mesure importante pour accroître la résilience et les facteurs de protection chez les jeunes d’aujourd’hui et de demain.

On peut consulter le site Web d’Eve Pouliot pour en savoir plus.


Heidi Tworek
University of British Columbia

Pour des messages de santé publique efficaces, il faut bien choisir ses mots

Apprendre des stratégies de communication adoptées à l’occasion des pandémies passées et actuelles

Comment une communication efficace en matière de santé publique peut-elle atténuer les conséquences d’une pandémie? Heidi Tworek, titulaire de la chaire de recherche du Canada sur l’histoire et la politique des communications en matière de santé de l’University of British Columbia, tente de répondre à cette question. Ses travaux examinent la manière dont les gouvernements et les autorités sanitaires ont communiqué pendant la crise de la COVID-19, mais aussi lors de pandémies antérieures, en étudiant les messages, les pratiques et les institutions qui ont des effets positifs sur le comportement individuel.

Elle estime que les mots que l’on utilise sont importants : le fait de qualifier le masque de mesure de protection ou de restriction change fondamentalement la perception qu’ont les gens des interventions mises en œuvre pour lutter contre la pandémie.

Heidi Tworek travaille, entre autres, avec des épidémiologistes, des informaticiens, des politologues et des historiens à analyser les communications d’autorités sanitaires du monde entier. Ses travaux lui ont permis de tirer plusieurs conclusions qui s’avèrent utiles pour le Canada.

À titre d’exemple, à Taïwan et en Corée du Sud, les autorités ont adopté des réformes visant à placer les communications au cœur de leurs stratégies de riposte à la pandémie, corrigeant ainsi les erreurs commises lors des pandémies de SRAS et de syndrome respiratoire du Moyen-Orient. Au cours de la pandémie de COVID-19, le fait de solliciter constamment la collaboration de la population a amélioré le taux de port du masque, en plus d’empêcher la propagation de rumeurs dangereuses. De son côté, la Nouvelle-Zélande avait appris l’importance des communications à l’occasion de la pandémie de grippe espagnole survenue en 1918 et 1919. Le pays a pu réagir avec rapidité et fermeté lorsque la COVID-19 est arrivée, puisqu’il avait disposé d’un siècle pour parfaire son approche.

La communication va dans les deux sens

La professeure Tworek s’intéresse également aux effets du cyberharcèlement sur le travail des responsables de la santé publique, des médecins, des infirmières et des autres acteurs canadiens importants durant la pandémie. Elle cherche un moyen de neutraliser ce vitriol, pour mettre fin à l’effet paralysant qui en découle et qui rend les spécialistes réticents à s’adresser à un large public.

Finalement, Heidi Tworek espère que ses recherches inciteront les décideurs et les autorités de santé publique à revoir leur façon de communiquer, ce qui pourra améliorer la riposte du Canada et du reste du monde face à de futures pandémies.

Consultez le site Web de Heidi Tworek (en anglais) pour en savoir plus sur ses travaux.


Myles Leslie
University of Calgary

COVID-19, moteur de changement

Des travaux de recherche orientés vers l’action alimentent les communications relatives à la santé publique durant la pandémie

En période de pandémie, les communications relatives à la santé publique ont une importance capitale. Or, les messages se brouillent facilement au fur et à mesure qu’ils sont relayés. Myles Leslie, directeur de la recherche à la School of Public Policy de l’University of Calgary, étudie des façons de résoudre ce problème pour que les Canadiennes et les Canadiens reçoivent des soins plus intégrés et uniformes.

Quand l’Organisation mondiale de la Santé publie une directive sur la prévention et le contrôle des infections, l’information est d’abord interprétée au niveau fédéral et provincial avant de parvenir à la clinique médicale locale qui doit ensuite l’appliquer. Mais qu’arrive-t-il si la directive en question n’est pas pratique pour le gestionnaire de la clinique ou un médecin de famille dont les ressources sont limitées?

Pour éliminer les erreurs et les incohérences dans la transmission des politiques sur la pandémie et améliorer la façon dont les ressources de prévention et de contrôle des infections sont diffusées, M. Leslie utilise une approche appelée « ethnographie participante » (alongsider ethnography). Au lieu d’être des observateurs invisibles, son équipe et lui collaborent directement avec les praticiens et les décideurs des services hospitaliers, des établissements de soins de courte durée et des cliniques de soins primaires afin de voir ce qui fonctionne ou non – et de les aider ensuite à opérer de vrais changements.

La recherche en action

Pour Myles Leslie, il s’agit d’une « recherche-action », car il se sert de ses résultats pour créer des liens entre les organisations de soins de santé et en leur sein, éliminant ainsi le cloisonnement et favorisant l’adoption de bonnes pratiques de prévention et de contrôle des infections. Son équipe a également conçu de vrais outils que les médecins peuvent utiliser au quotidien, comme un guide sur la réticence à l’égard de la vaccination (en anglais). Selon le chercheur, ces efforts ont entraîné une meilleure intégration à l’échelle du système de soins de santé albertain et ont clarifié les distinctions entre les multiples établissements et personnes chargés de fournir des soins dans la communauté.

« On veut tous un système de soins primaires mieux intégré, affirme M. Leslie. La pandémie a fait ressortir des problèmes qui existaient déjà, mais elle a aussi instigué un changement en réunissant autour d’une même table des personnes qui, avant, n’auraient pas été interpelées. »

Pour en savoir plus sur les travaux de Myles Leslie, consultez le site Ward of the 21st Century.

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