Changements climatiques et environnement

Adebayo Majekolagbe
Dalhousie University

Des transitions climatiques « justes » : une nécessité

Les politiques climatiques doivent tenir compte des plus vulnérables

Pour évaluer l’incidence des politiques climatiques, on ne peut s’en tenir à la réduction des émissions : il faut aussi se pencher sur les conséquences involontaires de ces politiques sur les populations vulnérables. Adebayo Majekolagbe (en anglais), boursier du Programme de bourses d’études supérieures du Canada Vanier et doctorant à la Schulich School of Law de la Dalhousie University, œuvre à la création d’un cadre d’évaluation d’impact afin d’aider les gouvernements à délaisser les combustibles fossiles d’une manière équitable et juste pour l’ensemble de la population.

Selon lui, une « transition juste » ne se limite pas à l’amélioration de l’empreinte carbone, elle fait du bien-être des plus vulnérables une priorité. À ce chapitre, nous avons encore du chemin à faire. Par exemple, malgré les subventions gouvernementales, les véhicules électriques pourraient demeurer hors de prix pour beaucoup de familles, ou un plan visant à contrebalancer la fermeture d’une centrale au charbon par la création d’emplois dans une centrale solaire pourrait être injuste si la transition nuit à la cohésion familiale, à la santé mentale et à la vitalité de la communauté.

Un cadre inédit

Pour aider les décideuses et décideurs, M. Majekolagbe étudie des évaluations d’impact climatique du monde entier afin de voir ce qui se fait (ou, la plupart du temps, ce qui ne se fait pas) en faveur de transitions justes. Il se servira ensuite des résultats pour créer un tout nouveau cadre d’évaluation d’impact axé sur la transition juste, qui favorisera la tenue de discussions constructives sur les avantages et les conséquences possibles des projets de transition écologique sur les populations vulnérables, et ce, le plus tôt possible dans les processus décisionnels et d’élaboration de politiques climatiques.

« Ça ne veut pas dire qu’on ne peut pas prendre de mesures ambitieuses et rapides pour le climat, explique-t-il. Il faut simplement se demander dès le départ quelles sont leurs conséquences potentielles. La lutte contre les changements climatiques a toujours un prix, la question est de savoir qui aura à le payer. »

Pour en savoir plus sur la recherche d’Adebayo Majekolagbe, lisez ses articles sur SSRN (en anglais).


Tristan Pearce
University of Northern British Columbia

Une action communautaire pour lutter contre les changements climatiques

Conjuguer savoir autochtone et science occidentale pour mieux intervenir

Les changements climatiques sont une problématique mondiale, mais les conséquences se font surtout sentir localement. Tristan Pearce, titulaire de la Chaire de recherche du Canada sur les effets cumulatifs des changements environnementaux à l’University of Northern British Columbia, collabore avec les communautés du Canada et du monde entier pour les aider à s’adapter aux changements climatiques et à accroître leur résilience.

Par exemple, dans l’Arctique canadien, il s’est associé à des Inuit pour comprendre l’incidence des changements dans le milieu marin sur les poissons et la faune, dont dépend la subsistance de ce peuple. Son initiative repose essentiellement sur la coproduction de connaissances, les données recueillies provenant à la fois de la science occidentale (ex. : échantillonnage et photographies aériennes) et des systèmes de savoirs autochtones, puisque les Inuit comprennent particulièrement bien les changements qui bouleversent leur environnement.

On obtient ainsi un portrait plus global des changements climatiques et des mesures à prendre pour les freiner. M. Pearce s’assure aussi que les membres des communautés prennent part à toutes les étapes de la recherche : ils orientent l’élaboration des questions de recherche, recueillent les données et participent à leur interprétation, et proposent les prochaines étapes en fonction des besoins locaux.

Les changements climatiques, c’est maintenant

Selon M. Pearce, ce projet et les autres initiatives internationales auxquelles il participe sont importants parce que les changements climatiques, ce n’est pas pour demain, c’est maintenant. En déterminant ce qui rend les communautés vulnérables au stress causé par les changements climatiques, il entend guider dans leurs efforts les décideuses et décideurs de tous les ordres de gouvernement, d’ici et d’ailleurs.

« Aujourd’hui, il y a beaucoup trop d’oubliés dans la lutte contre les changements climatiques, affirme-t-il. C’est pourquoi nos solutions doivent venir de la base. Il faut écouter les gens en première ligne et prendre des décisions en fonction de leur expérience. »

Pour en savoir plus sur les travaux de Tristan Pearce, consultez le site Web de l’Environmental Change Research Group (en anglais).


Deborah McGregor
York University

Transmettre le savoir autochtone sur l’environnement

De la nécessité d’intégrer les voix autochtones à la conversation sur les changements climatiques

Les peuples autochtones ont des points de vue et un savoir précieux qui peuvent contribuer à la recherche sur les changements climatiques, mais trop souvent, leurs voix sont exclues de la conversation. Deborah McGregor, titulaire de la Chaire de recherche du Canada sur la justice environnementale autochtone à l’Université York, travaille à créer l’espace nécessaire à la mobilisation du savoir autochtone pour que ces peuples puissent défendre leur droit de décider de leur avenir climatique.

Depuis longtemps, les collectivités autochtones se servent de récits et d’autres cadres pour faire état des changements environnementaux. Par exemple, le calendrier anishinaabe de 13 lunes repose sur une connaissance approfondie des cycles saisonniers et annuels de la nature, ce qui pourrait faciliter le recensement des conséquences des changements climatiques. Les langues autochtones jouent aussi un rôle central, puisqu’elles véhiculent leur propre perception du monde naturel, qui évoque des relations, responsabilités et devoirs mutuels d’intendance – des concepts souvent difficiles à exprimer en anglais. Ces langues et le savoir qu’elles incarnent peuvent contribuer à renouer une relation durable avec le monde naturel; pourtant, on n’invite généralement pas les aînés et gardiens du savoir à exposer leur pensée sur les changements climatiques lors des échanges tenus dans un cadre universitaire, scientifique, politique ou de gouvernance.

Trouver un espace pour le savoir autochtone

Deborah McGregor œuvre à remédier à cette situation au moyen de séries de conférences, de balados et d’autres tribunes où le savoir et les concepts inhérents aux langues autochtones sur l’avenir des changements climatiques peuvent être diffusés et influencer le cours des choses. Elle espère que cela améliorera la science, la recherche et la gouvernance relatives aux changements climatiques et créera aussi des ressources concrètes pour faire connaître les points de vue autochtones au public. Un des projets en préparation est une bande dessinée destinée aux jeunes et portant sur le calendrier de 13 lunes.

« Souvent, on met les Autochtones devant des solutions au lieu de leur donner l’occasion de trouver les leurs, affirme Deborah McGregor. Nous vivons des changements environnementaux majeurs depuis des milliers d’années et nous disposons de récits qui peuvent nous aider prendre des décisions. Il nous faut juste un espace où raconter ces histoires. »

Consultez le site Web du projet sur la justice environnementale autochtone (en anglais) pour en savoir plus sur les travaux de Deborah McGregor.

Date de modification :