Étude de la portée de la littérature sur le transfert modal de la voiture aux modes alternatifs 2010-2020

Version imprimable

Le projet

Cette recherche répond à la question suivante : quelles sont les principales stratégies de transfert modal discutées dans la littérature des 10 dernières années. Elle entreprend aussi d’analyser les impacts de chacune des stratégies présentes dans la littérature. Elle présente une étude de la portée de la littérature (scoping review) visant à dresser un portrait actuel de la littérature scientifique portant sur le transfert modal de la voiture vers les modes de transport alternatifs. Nous visions ainsi à synthétiser ces connaissances scientifiques pour en tirer des constats pour la recherche future et les politiques publiques visant à réduire la dépendance à l’automobile.

Nous avons révisé 2 872 recherches publiées entre 2010 et 2020 et en avons retenues 108 que nous avons analysées en détail. Nous avons classifié les interventions voulant induire un transfert modal selon cinq catégories : A) les habitudes ancrées dans le quotidien des automobilistes; B) les valeurs, les préférences, et les modes de vie; C) l’impact de leviers économiques comme la tarification des transports en commun ou des externalités de l’automobilité; D) les effets de l’offre de transport en commun et de la distribution spatiale de ses infrastructures; et E) les effets liés à l’aménagement du territoire et aux localisations résidentielles.

Les principales constatations

  • Plus de deux tiers des recherches rapportent des résultats positifs de transfert modal de la voiture au profit des mobilités alternatives.
  • Le nombre de publications scientifiques portant sur le transfert modal est en forte croissance, particulièrement entre 2014 et 2017.
  • Très peu d’études qualitatives ou à tout le moins mixtes (alliant quantitatif et qualitatif) sont présentes dans les études recensées. Il serait alors pertinent d’encourager la recherche qualitative sur le transfert modal afin de mieux comprendre les leviers et les freins de ce phénomène.
  • Peu de recherches se penchent sur les habitudes ancrées dans le quotidien des automobilistes ainsi que sur l’aménagement du territoire. Pourtant, une grande majorité des recherches portant sur les interventions liées aux habitudes rapportaient des effets positifs. Il apparaît donc nécessaire de suggérer d’encourager la recherche portant sur ces deux types d’interventions qui par ailleurs sont plutôt populaires auprès des aménagistes et des planificateurs de transport.
  • Certaines mesures des politiques de transport sont peu étudiées. En particulier les stationnements incitatifs, la mobilité urbaine intégrée (Mobility as a Service) et l'automobile en mode collectif ou partagé (covoiturage et autopartage) sont pratiquement absents de la littérature. Cela représente néanmoins des modes de transport émergents et fréquemment présents dans les discours politiques et il apparaît essentiel pour les chercheurs en transport de se pencher avec plus de vigueur sur le potentiel de transfert modal de ce type de politiques.
  • Seulement 6 % de la littérature scientifique recensée comportait des études effectuées sur le terrain qui avaient été réalisées au Canada, et ce, uniquement au Québec et en Ontario. Vu la diversité des grandes villes canadiennes et le grand nombre de villes petites et moyennes au pays, nous jugeons important d’exhorter nos collègues chercheurs ainsi que les bailleurs de fonds à enquêter sur une plus grande diversité de cas canadiens.

Ce que cela suppose pour les politiques

  • Comme plus de deux tiers des recherches rapportent des résultats positifs, nous croyons qu’il est possible de mettre en place des politiques publiques afin d’induire le transfert modal et d’ainsi contribuer à réduire notre dépendance à l’automobile.
  • Nous notons que la presque totalité des recherches (92 %) portant sur le transport actif rapporte des succès. Ce grand potentiel de succès nous porte à croire qu’il importe donc d’encourager les villes à tenter des interventions visant le report modal vers les transports actifs.
  • En portant attention au degré de coercition des interventions enquêtées dans la littérature, on constate que les mesures « carotte » qui offrent un bénéfice ont plus de succès que les mesures « bâton » qui visent à restreindre certains choix (tarification, péage, diminution des espaces de stationnement). Cependant, les recherches portant sur la combinaison « carotte + bâton » rapportent les résultats les plus positifs. Ceci nous amène à encourager la recherche sur ce type d’intervention et à suggérer aux décideurs publics de tenir compte des effets bénéfiques pour le transfert modal provenant de la combinaison de la « carotte » et du « bâton ». De plus, les bailleurs de fonds pourraient en faire un critère de financement.

Complément d’information

Rapport intégral

Coordonnées des chercheurs

Dominic Villeneuve, Ph. D. (il/lui), professeur adjoint à la Faculté d’aménagement, d’architecture, d’art et de design de l’Université Laval et membre du Centre de recherche en aménagement et développement  dominic.villeneuve@esad.ulaval.ca

Les autres chercheurs sont aussi tous membres du Centre de recherche en aménagement et développement. Il s’agit des professeurs agrégés Jean Dubé et Alexandre Lebel et des assistants de recherche Pierre-Paul Audate et Maxime

Les opinions exprimées dans cette fiche sont celles des auteurs; elles ne sont pas celles du CRSH, d’Infrastructure Canada ni du gouvernement du Canada.

Date de modification :