Dispersion et devenir des microplastiques dans les écosystèmes aquatiques : synthèse et orientation des recherches futures

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Le projet

Durable, léger et peu coûteux à produire, le plastique est une matière de choix qui convient à un large éventail de produits. Or, malgré ses avantages, on ne peut ignorer les difficultés liées à sa fin de vie. On estime que de 4,8 à 12,7 millions de tonnes de plastique auraient fini dans les océans en 2010. Ces dix dernières années, des particules de plastique dont la taille est inférieure à 5 millimètres  – les microplastiques – se sont ajoutées à la liste des polluants dangereux en raison de leurs effets sur la faune aquatique et sur la santé humaine. Le plastique est considéré comme étant relativement récalcitrant dans un système aquatique, puisqu’il peut prendre plusieurs siècles, voire des millénaires, à se décomposer et à se dégrader.

Répandus, les microplastiques se retrouvent aux quatre coins de la planète, jusque dans les sédiments les plus abyssaux et les régions arctiques éloignées. Leur répartition est grandement tributaire des conditions hydrodynamiques. Certains des processus physiques à l’origine de la mobilisation des nutriments, de l’oxygène et des sédiments, qui sont vitaux pour les écosystèmes aquatiques, peuvent également transporter des microplastiques. Les processus hydrodynamiques jouent un rôle important dans la dispersion et le dépôt des microplastiques aquatiques. Cependant, nous en savons peu sur la répartition géographique et temporelle des microplastiques et sur leur accumulation. Les objectifs de cette synthèse étaient de déterminer i) les caractéristiques des microplastiques et ii) les paramètres hydrodynamiques qui influencent leur répartition dans les environnements aquatiques.

Les principales constatations

Voici les principales constatations tirées de l’examen et de l’analyse exhaustive d’écrits évalués par des pairs.

  • Les microplastiques qu’on retrouve en eau marine et en eau douce ont des caractéristiques diverses, influencées par les propriétés du plastique (densité, rigidité) et par sa détérioration dans l’environnement. On les retrouve sous différentes formes : des microbilles et granules (microplastiques primaires fabriqués en taille microscopique) aux fragments, feuilles et films (sous-produits issus de la dégradation et de la fragmentation de plus gros articles en plastique). 
  • Propres aux microplastiques, ces caractéristiques diffèrent de celles d’autres contaminants ou sédiments. Par conséquent, la modélisation physique et numérique de l’étendue et de la dispersion de la pollution par les microplastiques doit en tenir compte. 
  • Les déchets de plastique n’ont pas tous la même densité. Certains ont une flottabilité positive (ils remontent à la surface), d’autres, une flottabilité négative (ils coulent). Ces dix dernières années, le « continent de plastique » qui flotte dans les gyres subtropicaux a attiré l’attention. Or si les plastiques à flottabilité positive composent une grande partie de la production de plastique, les microplastiques flottant à la surface ne représentent qu’une petite partie de la totalité des déchets de plastique dans l’eau. De nombreux articles évalués par des pairs font état de grandes quantités de microplastiques flottant dans les sédiments et les colonnes d’eau, ce qui indique que la répartition des particules de microplastique dépend d’autres facteurs que la densité. 
  • Des processus hydrodynamiques – plongée d’eau, turbulence, courants de surface, courants profonds, courants de gravité – régissent la dispersion des microplastiques. Plusieurs études attribuent la présence de ces contaminants dans des régions éloignées aux mouvements de recirculation océanique créés par les variations de salinité et de température de l’eau de mer dans le monde. De par leur taille, les microplastiques se déplacent facilement en profondeur et sur de longues distances et se répandent partout tant dans les écosystèmes d’eau douce que dans les écosystèmes marins.

Ce que cela suppose pour les politiques

  • Diminution du transport de produits fabriqués outremer. La majorité des matières premières plastiques et des mauvaises méthodes de gestion des déchets proviennent de l’Asie. Par conséquent, l’adoption de lois et de règlements visant à limiter et à contrôler la demande et l’utilisation de produits fabriqués outremer réduirait grandement l’empreinte plastique du Canada.
  • Élaboration de programmes de suivi de la qualité de l’eau en lien avec les microplastiques. Le Canada regorge d’écosystèmes d’eau douce riches, uniques au monde, où fourmille une diversité de plantes et d’animaux. Ce sont des sources d’eau potable, de nourriture, de tourisme et de loisirs pour la population. Même si les programmes de surveillance de la qualité de l’eau sont répandus au pays, dans certains plans d’eau, comme les Grands Lacs, on ne vérifie pas la présence de microplastiques. Par la conception, l’élaboration et la mise en application de programmes de surveillance, il est possible de repérer les endroits névralgiques et les accumulations de ces contaminants émergents dans les eaux douces du pays.
  • Soutien à la recherche interdisciplinaire. La recherche sur les microplastiques est souvent complexe, surtout en ce qui concerne leur source, leur déplacement et leur présence à long terme, leur toxicologie, ainsi que l’évaluation et l’atténuation des risques connexes. Ces dernières années, le gouvernement du Canada a financé la recherche sur la pollution par le plastique. Il faut un financement immédiat et continu de la collaboration interdisciplinaire pour s’attaquer aux enjeux complexes de la pollution par les microplastiques.

Complément d’information

Rapport intégral (en anglais)

Coordonnées des chercheurs

Shooka Karimpour, professeure adjointe en génie des ressources hydriques, Lassonde School of Engineering, Université York  shooka.karimpour@lassonde.yorku.ca

Satinder K. Brar, professeure en génie de l’environnement et titulaire de la chaire Love en génie de l’environnement, Lassonde School of Engineering, Université York  satinder.brar@lassonde.yorku.ca

Les opinions exprimées dans cette fiche sont celles des auteurs; elles ne sont pas celles du CRSH, du CRSNG, des IRSC, ni du gouvernement du Canada.

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