Création d’une trousse de données probantes contre les dangers qui menacent la biodiversité des eaux douces
Le projet
C’est bien connu, la biodiversité des eaux douces se trouve dans un tel état de déclin que l’on peut le qualifier de crise. Il est impératif de repenser la gestion des écosystèmes aquatiques et de munir les professionnelles et professionnels et leurs partenaires des données probantes nécessaires à la prise de décisions qui non seulement mettront un terme à la dégradation de la biodiversité des eaux douces, mais l’inverseront également.
Vu l’ampleur du territoire canadien et sa grande diversité géologique, climatique et biogéographique, il n’est guère surprenant que le pays ait des écosystèmes d’eaux douces riches et diversifiés. Cependant, même les régions les plus reculées ont été touchées par l’activité humaine. En dépit des incroyables capacités et connaissances scientifiques dont disposent sur les écosystèmes les organisations académiques et non gouvernementales, ainsi que les nombreux organismes régionaux, autochtones, provinciaux, territoriaux et fédéraux chargés de la gestion et de la protection de l’écosystème aquatique, les dangers pour la biodiversité des eaux douces sont omniprésents au Canada, et on constate que la pression s’accélère. En somme, le contexte canadien requiert une solution conçue au Canada et conforme à ses structures de gouvernance, à sa géographie, à ses cultures et à ses valeurs collectives.
Étant donné la quantité d’ouvrages sur le sujet, les contraintes de temps des décideuses et décideurs et des professionnelles et professionnels et l’importance de rassembler des études primaires pour élucider les effets courants et dégager les principales leçons, une bonne synthèse des données probantes (revues de la littérature) peut se révéler une ressource précieuse entraînant davantage de décisions fondées sur des données probantes et la mise en place de politiques et de pratiques efficaces. Il faut veiller à ce que les décideuses et décideurs et les professionnelles et professionnels travaillant à freiner la perte de biodiversité dans les eaux douces aient accès à de telles synthèses qui orienteront leurs mesures concrètes.
Les principales constatations
- La trousse de données probantes est composée de 53 interventions de gestion des eaux douces et de 259 synthèses des données probantes (publications datant de 1983 à 2020).
- Les sites d’étude de ces synthèses se situent dans 130 pays. La majorité des études ont été effectuées en Amérique du Nord (n = 179 [États-Unis], n = 88 [Canada]) et en Australie (n = 87).
- Les poissons étaient le groupe d’espèces le plus étudié dans les interventions de conservation (38 %), suivis par les invertébrés aquatiques (19 %) et les amphibiens (14 %).
- La plupart des synthèses ont obtenu une mauvaise note selon les critères du Collaboration for Environmental Evidence Synthesis Appraisal Tool (outil d’évaluation des collaborations pour la synthèse de données probantes sur l’environnement), qui évaluent la rigueur des méthodes, les risques de partialité et la transparence. Pour la plupart des critères, la note médiane était « rouge », c’est-à-dire que la majorité des synthèses ne décrivaient pas les méthodes de manière détaillée, transparente et systématique ou n’en signalaient pas les limites. Étant donné l’urgence de la crise de la biodiversité des eaux douces, il est troublant de constater qu’une bonne partie des données utilisées pour orienter les mesures sont peu fiables, ce qui pourrait mener à un gaspillage des ressources et à des décisions qui causent plus de tort que de bien.
- En général, la plupart des synthèses se sont bien classées selon les critères du Relevance and Applicability of Evidence Syntheses to Canada Appraisal Tool (outil d’évaluation de la pertinence et de l’applicabilité des synthèses de données probantes au Canada), qui évaluent la pertinence et le caractère pratique des synthèses pour les décideuses et décideurs et les professionnelles et professionnels des eaux douces canadiennes. Pour la plupart des critères, la note médiane était « or », indiquant que de nombreux éléments des synthèses, et donc, les synthèses mêmes, étaient pertinents et applicables à la biodiversité des eaux douces au Canada. Ce résultat prometteur suggère que la base de données probantes, bien qu’essentiellement de portée mondiale, peut être pertinente au niveau régional.
- Les synthèses ont obtenu des notes plutôt basses quant à la pertinence des données pour les décideuses et décideurs et les professionnelles et professionnels. Nous recommandons vivement que les synthèses futures – et pas seulement dans le domaine de la biodiversité des eaux douces – fassent ressortir les conséquences ainsi que des lignes directrices et des recommandations claires, concises et applicables pour les les décideuses et décideurs et les professionnelles et professionnels.
Ce que cela suppose pour les politiques
La conception de cette trousse de données probantes est une étape importante pour outiller les professionnelles et professionnels, mais il faudra un effort collectif de la part de nombreux acteurs (responsables des politiques, milieu de la recherche, organismes et sociétés de professionnels, groupes de pression, organisations non gouvernementales [ONG] et industries, entre autres) pour garantir que les professionnelles et professionnels ont les connaissances, les outils et les conditions dont elles et ils ont besoin pour prendre des mesures locales visant à contrer les dangers pour la biodiversité des eaux douces.
- Les responsables des politiques doivent voir à ce que les politiques liées à la biodiversité des eaux douces soient créées selon les meilleures données scientifiques disponibles (avec l’aide de trousses de données probantes) et que cela soit fait en partenariat avec les personnes travaillant dans le cadre de ces politiques.
- Les responsables des politiques doivent s’assurer que les professionnelles et professionnels appliquant les politiques disposent d’amplement de temps, de fonds et d’autres mesures de soutien.
- La création de conditions propices n’incombe pas seulement aux responsables des politiques, mais aussi aux décideuses et décideurs des organisations dans lesquelles travaillent les professionnelles et professionnels. Pour les ONG, les organisations du secteur ou les groupes de pression qui visent des objectifs en lien avec la biodiversité des eaux douces, le soutien de cette dernière et des professionnelles et professionnels peut être intégré à la culture organisationnelle et à l’image de marque.
Complément d’information
Rapport intégral (en anglais)
Coordonnées des chercheurs
Steven Cooke, Carleton University Steven.cooke@carleton.ca
Les opinions exprimées dans cette fiche sont celles des auteurs; elles ne sont pas celles du CRSH, du CRSNG, des IRSC, ni du gouvernement du Canada.
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