Prise en compte de la dimension du genre dans la gouvernance du commerce international à la faveur des relations commerciales Canada – Royaume-Uni

Version imprimable

L’égalité des sexes est en train de s’imposer comme norme dans la gouvernance du commerce international. Le Canada et le Royaume-Uni ont tous deux fait la promotion de l’égalité des sexes et se sont engagés à faire en sorte que le commerce soit un levier pour la favoriser. C’est pourquoi ils sont fort bien placés pour tracer la voie à suivre en matière de genre et de commerce à l’échelle mondiale. Dans le contexte politique actuel, cela signifie :

  • formuler des politiques commerciales nationales qui cernent et atténuent les impacts sexospécifiques du commerce international et exploiter le potentiel des échanges commerciaux mondiaux pour favoriser l’égalité des sexes à l’échelle nationale ainsi qu’au moyen des objectifs de développement durable des Nations Unies;
  • élaborer des pratiques exemplaires pour la formulation, la mise en œuvre, le suivi et l’application des chapitres et articles sur l’égalité des sexes et des dispositions ayant trait à la lutte contre la discrimination fondée sur le sexe dans les accords de libre-échange, lesquelles pratiques pourraient faire office de nouvelle norme juridique internationale en matière de genre et de commerce;
  • déterminer les questions prioritaires à aborder dans le cadre d’un dialogue international sur les politiques, mettre au point des indicateurs et des pratiques d’établissement de rapports et formuler et mettre à exécution des dispositions portant sur l’égalité des sexes dans les accords commerciaux multilatéraux, les suivre de près et veiller à ce qu’elles soient respectées.

Le projet de synthèse des connaissances, exécuté de juin à novembre 2018, a permis de faire le bilan des connaissances théoriques sur le lien entre le genre et le commerce en vue de procéder à l’élaboration de politiques fondées sur des données probantes dans ce domaine. Il a également cerné les tendances qui se dégagent des initiatives axées sur le genre et le commerce menées à l’heure actuelle à l’échelle de la gouvernance économique mondiale en associant différentes méthodes de recherche qualitatives et quantitatives en sciences sociales. Ces méthodes comprenaient la revue de la littérature, l’analyse de documents, des statistiques descriptives et l’observation participante.

  • Les grands ouvrages d’économie classiques portent dans une large mesure sur l’incidence des échanges commerciaux sur le salaire et la participation au marché du travail des hommes et des femmes.
  • L’économie féministe élargit la portée de l’analyse en examinant l’incidence du commerce sur les femmes dans leurs rôles de travailleuses non rémunérées ainsi que les interactions entre les échanges commerciaux et les normes sexospécifiques.
  • Les approches de l’économie politique internationale d’un point de vue féministe prennent également en considération les rapports de force entre les sexes à l’échelle mondiale, à l’intérieur des frontières nationales et au sein des ménages, de même que la façon dont ces rapports de force influent sur les politiques commerciales et sont touchés par celles-ci. Ces approches révèlent la complexité et les multiples facettes du caractère sexospécifique du commerce et leurs effets.
  • Il faut davantage de recherches sur des outils concrets permettant d’évaluer les négociations commerciales, les accords commerciaux et les impacts sexospécifiques dans le domaine de l’économie politique.
  • Les chercheures ont réuni un ensemble de données provenant d’initiatives axées sur le genre et le commerce menées depuis 1991, données qui ont été codées en fonction de plusieurs variables. Elles ont recensé 77 initiatives en matière de genre et de commerce, qu’elles ont codées en fonction de 32 dimensions, exposant d’importants points de convergence et des lacunes sur le plan de la couverture.
  • La revue de la littérature et l’analyse des initiatives commerciales ont toutes deux fait ressortir la nécessité de concevoir et de déployer des évaluations des impacts sexospécifiques des accords commerciaux. Les chercheures donnent un aperçu des cadres proposés par des cabinets d’experts-conseils privés, des groupes de la société civile, des spécialistes universitaires et des organismes œuvrant dans le domaine du commerce, et elles indiquent un certain nombre de questions que les gouvernements désireux de procéder à des évaluations des impacts devraient prendre en compte.
  • Elles suggèrent d’autres mesures en matière, entre autres, de mise en œuvre, de suivi, d’application et d’échange de connaissances.
  • Évaluations des impacts sexospécifiques. Le Canada et le Royaume-Uni peuvent établir la norme de référence en matière d’évaluation des impacts sexospécifiques. Pour cela, ils peuvent analyser le contexte général dans lequel les accords commerciaux sont négociés, la capacité technique des partenaires commerciaux pour ce qui est de l’évaluation des impacts sexospécifiques et l’application de l’évaluation des impacts sexospécifiques au texte intégral d’accords de libre-échange. Les évaluations des impacts sexospécifiques doivent prêter attention à l’intersectionnalité et tenir compte des multiples rôles que jouent les hommes et les femmes en tant que travailleurs, consommateurs, producteurs agricoles, proches aidants non rémunérés et utilisateurs de services.
  • Mise en œuvre, suivi et application sexospécifiques des règles commerciales. Il s’agit d’inviter des tiers indépendants à mener de rigoureuses évaluations ex post (c’est-à-dire a posteriori) des impacts sexospécifiques des accords commerciaux, et ce, à intervalles réguliers. Les évaluations doivent tenir compte de l’économie productive (la production de biens) ainsi que du travail domestique, du travail relié à la reproduction sociale (comme l’éducation des enfants) et des activités de loisirs. Elles doivent aussi comprendre un examen attentif du texte intégral des accords et des politiques pour en cerner les impacts sexospécifiques négatifs non prévus.
  • Échange et transfert de connaissances. Il s’agit d’amorcer un dialogue avec un large éventail de parties prenantes en ce qui concerne l’élaboration, la mise en œuvre, le suivi et l’application de politiques commerciales et de communiquer les connaissances réunies à ce sujet. Les parties prenantes peuvent comprendre des entreprises, des mouvements syndicaux, des acteurs de la société civile (y compris des groupes de femmes), des universitaires et des représentants des sphères de politiques connexes (dont des fournisseurs de services sociaux). Il y a également échange de connaissances avec des organismes et des entreprises d’envergure internationale qui parrainent des initiatives mondiales en matière de genre et de commerce.
  • Moteurs de changement social progressiste à l’échelle mondiale. Le Canada et le Royaume-Uni peuvent exercer un leadership efficace à l’international dans l’élaboration de politiques publiques en :
    • incitant les partenaires commerciaux et les organismes internationaux à adopter une vision mondiale et à accroître l’ampleur des initiatives en matière de genre et de commerce de sorte qu’elles ne se limitent plus à quelques pays d’Afrique subsaharienne. Il faut inclure les femmes d’Asie, d’Amérique latine et des Caraïbes ainsi que celles des économies avancées;
    • mettant l’accent sur l’atténuation des effets négatifs de la libéralisation du commerce, en particulier sur l’économie non structurée, l’économie du prendre soin, le travail de reproduction sociale et le travail non rémunéré. Il convient également d’accorder plus d’attention à la féminisation de la main-d’œuvre, aux disparités salariales entre les sexes, à la qualité des emplois et à la précarité de l’entrepreneuriat, surtout, mais pas exclusivement, dans l’hémisphère Sud.

Rapport intégral (en anglais)

Coordonnées des chercheures

Erin Hannah, professeure agrégée et directrice du Département des sciences politiques, King’s University College de la Western University ehannah2@uwo.ca

Adrienne Roberts, maître de conférences principale en politique internationale, Département des sciences politiques, University of Manchester adrienne.roberts@manchester.ac.uk

Silke Trommer, maître de conférences en sciences politiques, Département des sciences politiques, University of Manchester silke.trommer@manchester.ac.uk


Ce projet de recherche a été financé par le Conseil de recherches en sciences humaines (CRSH) et l’Economic and Social Research Council (ESRC), qui fait partie de UK Research and Innovation, dans le cadre du concours visant l’attribution de subventions de synthèse des connaissances pour examiner l’avenir des relations commerciales entre le Canada et le Royaume-Uni. Les opinions exprimées dans cette fiche sont celles des auteurs; elles ne correspondent pas nécessairement à celles du CRSH et de l’ESRC.


Logo : Conseil de recherches en sciences humaines

Logo : Economic and Social Research Council - UK Research and Innovation


Date de modification :