Contenu autochtone dans l’enseignement public

Comment inciter les enseignants à tenir compte des perspectives et des connaissances autochtones

Sonya Ermine s’adresse à ses élèves de première année, à la Sturgeon Lake Central School. Il y a quelques années, elle est revenue dans sa communauté d’origine pour approfondir sa connaissance de la langue et de la culture cries. Photo : © Chanss Lagaden / CBC

Étant donné la croissance rapide de la population autochtone ces dernières décennies, un nombre sans précédent de jeunes Autochtones fréquentent les écoles publiques au Canada. Il importe que les apprenants autochtones, à l’instar des autres élèves, se reconnaissent dans les programmes d’études; or, ce n’est pas toujours le cas. Jean-Paul Restoule et son équipe, composée de chercheurs de l’University of Victoria et de l’Institut d’études pédagogiques de l’Ontario qui fait partie de l’University of Toronto, veulent savoir pourquoi.

« Étant Autochtone, j’ai toujours été intéressé par l’expérience autochtone de la scolarisation, ce que nos enseignants savent et ce qu’ils ignorent, et comment ils nous aident à cerner qui nous sommes », dit-il.

Un lieu d’échanges sécurisant

Lorsque M. Restoule a amorcé ses travaux, les enseignants lui ont expliqué qu’ils ne disposaient pas des ressources nécessaires pour intégrer l’histoire et la culture autochtones dans leurs cours. Du nouveau matériel didactique leur a alors été fourni, mais les enseignants ne l‘ont pas utilisé.

Voyant cela, M. Restoule a organisé un atelier d’une journée dans le but de déterminer les autres facteurs en cause. Les participants pouvaient s’exprimer de la manière qui leur convenait le mieux : discussion en groupe, pièce de théâtre, arts visuels ou écrits sur les difficultés que présente l’enseignement du contenu autochtone. L’équipe a ensuite analysé les éléments d’information ayant émané de cet atelier et en a dégagé les grands axes. Elle a aussi demandé aux enseignants de consigner leurs expériences dans un journal afin d’approfondir encore davantage la question.

Peur de l’intrusion et autres obstacles

Bien que ce projet n’en soit encore qu’à ses débuts, quelques thèmes clés ont émergé, notamment ce que M. Restoule appelle la « peur de l’intrusion » (peur de l’appropriation ou de la représentation erronée des peuples autochtones et de leur histoire).

« Souvent, les enseignants non autochtones sont très réticents, dit-il. Ils ont peur d’offenser quelqu’un s’ils parlent de ces choses. Ils estiment ne pas avoir la légitimité nécessaire et se trouver dans une zone qui appartient, à juste titre, aux Autochtones ».

De nombreux enseignants ont également dit qu’ils n’obtenaient pas le soutien de leur établissement ou de leurs pairs pour présenter du contenu autochtone. C’est pourquoi l’équipe de M. Restoule envisage maintenant de créer un réseau qui favorisera le soutien et le mentorat entre pairs, afin de donner aux enseignants la confiance et les moyens nécessaires pour enseigner ce contenu en classe.

Un pas vers la réconciliation

En ce qui concerne les aspects associés à la justice sociale, les peuples autochtones du Canada sont bien souvent surreprésentés : leurs taux d’incarcération, de suicide, de violence et de toxicomanie sont plus élevés que ceux que l’on observe dans le reste de la population. M. Restoule estime que c’est la société tout entière qui doit s’attaquer à ces questions. Et pour que cela se produise, les Canadiens doivent apprendre l’histoire des peuples autochtones du pays.

« Il est vraiment important que tous les enfants canadiens aient une idée des points de vue autochtones sur tous les sujets abordés en classe, affirme-t-il. Nous espérons que nos travaux amélioreront l’enseignement du contenu autochtone et permettront à la génération qui suit de mieux connaître les peuples autochtones. »

Vous voulez en savoir plus?

Pour en savoir plus sur les travaux de M. Restoule et de son équipe, consulter le site Web du projet (en anglais) ou lire l’article « Les anciennes façons nous montrent la voie à suivre : comment la pédagogie autochtone peut profiter à tous », publié dans le site Web de la Commission canadienne pour l’UNESCO.