Le Canada contribue à un pôle international d’expertise
Les nouvelles applications numériques modifient la façon dont le milieu universitaire utilise les technologies de l’information et des communications en matière de recherche. Les chercheurs doivent dorénavant composer avec les défis que pose la complexité de la collecte, de la gestion, de l’analyse et du partage de données massives.
Professeur du Département de linguistique et de traduction de l’Université de Montréal, Patrick Drouin comprend bien ces nouveaux défis. Il dirige le projet Texto4science, volet canadien de l’étude internationale sms4science à laquelle participent une quinzaine d’universités dans le monde ainsi que des partenaires du secteur privé, notamment Swisscom et la Société française du radiotéléphone. Le principal objectif de cette étude est de bâtir de vastes corpus de textos* dans un grand nombre de langues afin de mieux comprendre cette forme de communication en pleine expansion ainsi que le langage qu’elle véhicule.
Afin d’assembler une banque canadienne de textos dans les deux langues officielles, M. Drouin a dû faire appel au don volontaire. Malgré les contraintes liées au droit d’auteur et aux frais d’envoi, il a reçu 7 300 messages textes en français et 15 000 en anglais. Près de 75 p. 100 des participants sont âgés de 12 à 39 ans.
« Il s’agit de la première banque de textos français‑anglais du monde. Pour l’instant, la banque de données en français est disponible sur demande pour tous les chercheurs, et celle en anglais suivra sous peu », précise‑t‑il.
La réussite du projet est importante pour la communauté des chercheurs. La communication par textos a donné lieu à de nombreuses recherches dans divers domaines (linguistique, sociologie, anthropologie psychologie, etc.) partout dans le monde, mais le manque de données « authentiques » a limité leur portée. Texto4science contribue à combler ce manque.
Et quand on questionne le linguiste sur les effets potentiellement négatifs des textos – souvent écrits au son – sur la qualité de la langue, il ne s’inquiète pas trop : « Je crois que les gens sont conscients qu’ils déforment les mots, et certains font d’ailleurs preuve d’une belle créativité et d’une grande maîtrise de la langue, à la façon de certains auteurs comme Fred Pellerin, au Québec. Chose certaine, les textos montrent que les jeunes écrivent tout le temps, ce qui n’est pas une mauvaise chose en soi », conclut le chercheur.
*Les textos, aussi appelés messages textes ou SMS (short message service), sont des messages courts, d’environ 160 caractères, échangés entre deux personnes au moyen d’un téléphone cellulaire. Pour le seul mois de septembre 2012, les Canadiens ont échangé 8,2 milliards de textos entre eux. C bokou!
Recherche financée par le CRSH : Texto4science : une étude bilingue du langage des textos canadiens